Résumé

Les conteurs sont aujourd’hui présents dans l’ensemble des programmations culturelles des collectivités territoriales. Mais qui sont-ils et qu’entend-on par conteur ? Cet article entend présenter différents groupes de conteurs, les uns issus d’une longue tradition de conte public ; les autres ayant créé une nouvelle profession artistique. Les premiers sont présents sur les scènes des manifestations régionalistes, les seconds construisent des réseaux professionnels. Comment situer ces groupes au regard de la définition que l’UNESCO donne du Patrimoine Culturel Immatériel ?

Abstract

"Communities" of storytellers.
Storytellers are now present in all of the cultural programming of local authorities. But who are they ? This paper presents two different groups of storytellers, those with a long tradition of public storytelling and those who have created a new artistic profession. The first group is generally present at regional festivals, the second builds professional networks on a larger scale. How can we understand these two groups in the light of the definition that UNESCO gives to the concept of Intangible Cultural Heritage ?

Sommaire

Table des matières

La trace du conteur... (ill. 1)
Photographie : Patricia Heiniger-Castéret, festival de Siros, 1991.
Photographie : Patricia Heiniger-Castéret, festival de Siros, 1991.

A la recherche des conteurs


Personnage emblématique et objet de toutes les attentions, le conteur est l’un des sujets de prédilection de la recherche en folklore, puis en ethnologie, des pays européens depuis la fin du XVIIIe siècle. Les folkloristes, adoptant tous les mêmes méthodes de travail, se sont attachés aux récits et les ont abordés et traités en « monuments » littéraires, les considérant comme des rémanences d’une littérature archaïque portant les traces de civilisations anciennes qu’il fallait se hâter de recueillir au risque de les perdre définitivement. Les définitions modernes du terme « conte » viennent de là. Quant aux témoins, considérés comme les dépositaires et les passeurs d’un savoir qui est, selon les canons scientifiques du temps, qualifié « d’immuable » et « d’immémorial », ils sont magnifiés dans leur « simplicité originelle ».

A partir des années 1950, les ethnologues revisitent ce champ d’étude. De nouvelles perspectives de recherches s’ouvrent en sociolinguistique, en kinésique, en dynamique cognitive et le conteur apparaît enfin. De pourvoyeur de récits pour un folkloriste, à témoin dévoilé pour un ethnologue, il offre toutes les techniques dynamiques d’un art qui jusqu’alors avait été occulté par l’importance accordée aux textes (Belmont, 1999). Cependant si les folkloristes et les ethnologues insistent, chacun pour leur époque, sur leur difficulté à trouver des témoins, en 2012 il n’est que d’interroger l’un des moteurs de recherche d’internet pour obtenir 632 000 occurrences pour le terme « conteur », 1 570 000 occurrences pour « Festival de contes » et 2 930 000 occurrences pour « formation aux contes ». Les conteurs sont aujourd’hui présents dans de nombreuses programmations culturelles, qui sont-ils et qu’entend-on par « conteur » ?

Nous présenterons différents groupes de conteurs, les uns issus d’une longue tradition de conte public ; les autres ayant construit une profession artistique. Nous confronterons les données de notre terrain d’observation, en sud Gascogne [1] (où nous pouvons suivre la pratique publique du conte, déjà suggérée par les folkloristes et révélée par les veillées et festivals de culture régionale) à celles de l’analyse de la structuration du mouvement des conteurs professionnels. Enfin nous interrogerons ces deux groupes au regard de l’inventaire du Patrimoine Culturel Immatériel (PCI), tel qu’il est pratiqué aujourd’hui en France.

Les deux expressions de la tradition


Dans son ouvrage consacré à l’étude des contes franco-terreneuviens, Gérald Thomas (1983) révèle deux types de traditions contées. L’une, canonisée par les recherches en folklore, celle du témoin seul, ne divulguant son art qu’au cercle restreint et confidentiel de la famille et des amis proches ; et l’autre, ouverte à un auditoire plus large se donnant dans des lieux publics : une situation identique à celle que nous observions, en 1984, au début de nos recherches sur les conteurs et leurs répertoires dans le sud de la Gascogne. A l’identique, nous étions confrontée à une tradition familiale et de voisinage comme à des conteurs auto-désignés se produisant sur les scènes des veillées et festivals de culture régionale. Or, ce sont ces derniers qui ont retenu notre attention même s’ils pouvaient paraître suspects, à ce moment-là, aux yeux des chercheurs en littérature orale.

Les folkloristes et les « catégories » de conteurs


Les folkloristes sont à l’origine de cette suspicion. Les travaux pionniers des frères Grimm donnent une méthodologie de la collecte de terrain allant du choix des témoins au choix des récits, en passant par leur analyse et leur restitution (Belmont, 1999 : 25-59). Les folkloristes français ayant à cœur de placer leurs interrogations dans une dynamique scientifique mettent ainsi à profit ces enseignements. S’il n’existe pas, à l’image d’autres pays européens, de chaire en folklore dans l’Université française de la fin du XIXe siècle et si l’étude des contes est dirigée par des médiévistes philologues comme Gaston Paris ou Joseph Bédier, la collecte de terrain est cependant fructueuse. Elle est essentiellement effectuée par des notables bien implantés dans leurs circonscriptions, véritables élites intellectuelles ayant développé un réseau d’échanges épistolaires (Arnaudin, 1999) sur les questions de la collecte, de la restitution, de la comparaison et de l’analyse des corpus.

Loin des centres universitaires, ils adoptent une démarche scientifique, préoccupés par la découverte des “bons” conteurs, dociles à la dictée, directs dans leurs récits et s’exprimant avec une grande économie de mots. A titre d’exemple, pour la collecte en Gascogne, le folkloriste Jean-François Bladé, dans sa publication de 1886, identifie deux catégories de conteurs relevant de la tradition orale. Il note que, dans sa quête de témoins, les conteurs dignes d’intérêt, « à la narration sobre et exacte », sont difficiles à trouver ; lui-même étant souvent confronté à des sujets « qui ne méritent qu’une confiance restreinte », « peu soucieux du style, et préoccupés surtout des idées et des faits, longs et diffus » (1886 : XXXI). Dès les premiers travaux, les folkloristes opèrent un tri entre les témoins porteurs de récits de tradition orale qu’ils rencontrent. Privilégiant les narrations brèves transmises dans un cadre intime aux dépens des mises en représentation emphatiques et publiques, ils sont guidés par le souci du « document oral », de son traitement scientifique et de son édition. Mais au-delà du récit édité, ces chercheurs du XIXe siècle définissent le portrait-type du « conteur de tradition orale » (Latry, 2002).

Quand le conteur monte sur scène


Au moment même où les folkloristes opèrent des choix scientifiques, la narrativité publique trouve des espaces nouveaux d’expression par le truchement des mouvements littéraires, culturels et identitaires qui touchent les provinces françaises au milieu du XIXe siècle. Le sud de la France, où est parlée la langue d’oc, sera marqué par le Félibrige, mouvement né en 1854 (Camproux, 1971). Pendant plus de quatre-vingts ans ce mouvement, qui gagnera l’ensemble « des provinces du Midi », s’illustrera dans la production d’œuvres littéraires et dans l’organisation de manifestations culturelles de niveaux tout à fait variables. Les félibres ont une approche romantique des traditions orales, elles sont pour eux des sources d’inspiration, aucunement des objets d’étude scientifique (Pasquini, 1988) [2]. C’est dans les félibrées que s’illustreront des conteurs à l’expression théâtrale. Ces hommes sont essentiellement des artisans, des commerçants, parfois des paysans, qui tous parlent la langue d’oc et offrent, à un large public, les récits qu’ils disent habituellement à un auditoire de village (Heiniger, 1990). Leurs noms s’affichent. Leurs prestations sont remarquées par les chroniqueurs des quotidiens locaux qui relèvent les réactions de l’assistance, toujours enjouées. Des conteurs sont donc à l’affiche de toutes les félibrées, veillées et rassemblements culturels de langue d’oc. Les récits qu’ils présentent sont majoritairement facétieux et issus de la tradition orale.

On pourrait être amené à faire un parallèle entre le développement du mouvement félibréen et la “révélation” d’un phénomène nouveau, celui des conteurs d’expression publique. Or la renommée de ces personnages ne fait que changer d’échelle, d’une reconnaissance villageoise, ils passent à une reconnaissance départementale. De cette première période félibréenne qui, en Gascogne, s’estompera dans les années 1950, subsistent un certain nombre de recueils, quelques affiches et photos et de nombreux articles.

Carte postale publicitaire, recto-verso, du célèbre Caddétou de Mazères alias Cazenave-Lacroutz du village de Mazères-Lezons.


Salle des fêtes et scènes des festivals : lieux de reconnaissance et espaces de transfert


A l’ère du Félibrige finissant et de l’occitanisme naissant, vers 1967 [3], des festivals de culture régionale, des veillées ou soirées qualifiées de gasconnes, béarnaises ou bigourdanes ont permis aux conteurs publics de tradition de poursuivre leur carrière. Des figures se sont effacées, d’autres ont émergé. Les répertoires ont évolué. Aux récits de tradition orale familiale et villageoise se sont rajoutés des textes tirés d’almanachs félibréens d’avant 1930, mais aussi des récits de vie et des anecdotes de la vie quotidienne croqués sous l’angle de la facétie (Heiniger et Valière, 1988). Pour mieux saisir la pérennité des conteurs de tradition publique, il convient de prendre en considération la transformation profonde des milieux ruraux au début des « trente glorieuses » et l’émergence de nouveaux espaces de sociabilité. Dans cette seconde moitié du XXe siècle, de nouvelles références sociales et comportementales s’affirment et de nouveaux espaces de convivialité s’imposent à l’ensemble des communautés. Les salles des fêtes deviennent les lieux d’accueil des manifestations culturelles. Construites à partir des années 1950, elles vont fonctionner comme des espaces de transfert, se substituant aux cafés et aux ateliers d’artisans qui occupaient jusqu’alors cette place centrale dans les société rurales (Fabre, Lacroix et Lanneau, 1980). En effet, les artistes locaux, dont les conteurs, se produisent ou font leurs premières armes dans les programmations mises en place par les comités des fêtes ou par les diverses associations issues du mouvement d’éducation populaire. Les scènes annuelles des festivals parachèvent leur reconnaissance à un niveau départemental voire régional.

Ces espaces seront également les lieux privilégiés de captation des répertoires des conteurs en action. Des maisons de disques locales [4] trouvent matière à réaliser des productions sonores. À partir des années 1980, des radios libres relatent et diffusent de larges extraits de ces répertoires et, enfin, des spectateurs effectuent des enregistrements pirates « in vivo » de certains conteurs. A ce stade, il est intéressant de remarquer que l’enregistrement a eu — et a conservé — la même fonction que l’édition de recueils ou de récits dans les almanachs en ce qui concerne la transmission, la divulgation et la réactivation des corpus oraux. L’occasion nous a, en effet, régulièrement été donnée, lors d’assemblées familiales, associatives ou autres, d’entendre, par des anonymes, des motifs voire des parties importantes des répertoires de ces conteurs publics.

Du disque au blog


Les productions sonores commercialisées poursuivent l’affirmation des positions particulières de ces conteurs de tradition publique au sein de leur communauté. Les vinyles, les cassettes et enfin les CD sont achetés, écoutés en famille ou avec des amis, parfois en boucle jusqu’à usure des supports. Ces objets sont minutieusement conservés, même si actuellement l’évolution technologique ne permet plus leur écoute. L’enquête de terrain suscite l’exhumation de ces “trésors familiaux” qui ont remplacé aujourd’hui les almanachs que nous rencontrions au début de notre recherche. Force est de constater qu’un support est toujours là, faisant le lien entre le conteur public et son auditoire. Que l’on manipule un imprimé ou un disque on est sûr de toujours se souvenir. L’objet est le médiateur, support de la mémoire, témoin des chemins qu’empruntent les répertoires et traces de l’exercice même de l’acte de conter. Les conteurs de tradition publique laissent ainsi des marques de leurs passage dans le temps. Avec la dématérialisation récente des supports on pourrait, toutefois, être amené à croire à un effacement de leur existence. Il n’en est rien, bien au contraire. La toile est un espace sans limite qui transcende le groupe des conteurs. Pierre Pous [5], conteur de tradition orale, témoin important de la collecte de D. Fabre et J. Lacroix (1975a ; 1975b), côtoie un Jean-Claude Coudouy [6], boucher de son état, qui depuis 1969 marque de son empreinte orale l’ensemble des scènes du sud de la Gascogne (illustration 7). La communication dématérialisée fait éclater les frontières territoriales et autorise la rencontre de ces conteurs de tradition d’expressions différentes. Certains d’entre eux, les plus jeunes, nés dans les années 1980, ont créé leur page web où ils notent leurs dates de représentations, offrent aux visiteurs des éléments de leur biographie et donnent à voir leurs réseaux militants et amicaux [7]. Parfois la route de ces conteurs de tradition publique croise, lors d’actions communes, celle d’artistes musiciens et plasticiens, leurs prestations se retrouvant ainsi captées et mises en ligne [8]. Cette dernière démarche les place dans un cadre artistique professionnel (illustration 8). Cependant, à l’observation des prestations, il n’y a pas une mise à distance romantique des récits. La parole est directe, d’un phrasé naturel commun à l’auditoire et le conteur joue le rôle d’un naïf rusé, conforme aux canons du conte de tradition orale décrits par les folkloristes.

Pour compléter ce panorama dématérialisé, il est intéressant de relever la présence de blogs où des amateurs de contes font part de leurs lectures et d’écoutes de conteurs parmi lesquels on retrouve des conteurs de tradition publique [9]. Tout aussi intéressants sont les forums où s’exposent les échanges des internautes à l’image d’Ossau.net [10] en 2008. La recherche d’un enregistrement par un des bloggeurs met en action une chaîne de réponses où, à travers ces échanges, se dessine un espace qui s’accorde sur les mêmes références en matière de récits et de conteurs, entre le Gers et la vallée d’Ossau. La consultation des sites de partage comme YouTube ou Dailymotion où sont versés tous types de documents [11] poursuit cette chaîne de références communes sur un certain type d’expression contée.

Ces démarches relèvent à la fois d’une quête patrimoniale tout autant que d’une affirmation de la présence, de longue date, du conte d’expression publique tout en soulignant son activité la plus actuelle. Cette observation pourrait nous amener, mais ce n’est pas le propos de cet article, à saisir l’évolution de l’expression scénique, thématique et linguistique de cette tradition du conte public afin de comprendre l’adéquation conteur/société.

Aucun de ces protagonistes ne sont des professionnels du conte. Ils sont fonctionnaires, artisans, agriculteurs, employés de bureau, ouvriers, retraités. Ils sont à l’image de leur auditoire mais dotés d’un savoir-faire supplémentaire : l’art de croquer des scènes de la vie quotidienne en les détournant légèrement. Ils se sont donnés une formation faite d’observation, d’écoute, de tentatives et de recommencements. La narration, la facétie, le jeu d’esprit, l’anecdote, le jeu des langues, la kinésique, ils y sont sensibles et ils retiennent l’ensemble de ces données pour façonner des récits dont ils se font les héros ou les observateurs. Ce qui pourrait les différencier des conteurs professionnels est leur rapport au récit : ils sont dans une oralité directe à savoir qu’ils sont dans le geste mais non dans la monumentalisation. Ainsi, ces conteurs publics de tradition et de langue régionale, que l’on a très/trop vite nommés néo-conteurs (Heiniger, 1997), et qui continuent de pratiquer leur passion, n’ont jamais vraiment retenu l’attention des chercheurs (Pelen, 1983) et sont presque ignorés par le mouvement des conteurs professionnels.


L’invention d’un métier, la construction de réseaux


Au moment où le conte public de tradition investissait les salles des fêtes, espaces de sociabilité nouvellement construits, dans les années 1960, dans les villages et bourgades, un phénomène nouveau, touchant l’expression contée, était en train d’apparaître en milieu urbain. L’article de Veronika Görög-Karady, « Qui conte en France aujourd’hui ? — Les nouveaux conteurs » (1981), révèle à la communauté scientifique cette démarche artistique portée par de jeunes citadins en rupture avec leur statut social et leurs formations scolaires et artistiques. Nous sommes en 1968 et le conte populaire devient un terrain d’expérimentation, une matière à explorer et à exploiter. C’est ainsi que Bruno de La Salle [12] rencontre Marie-Louise Tenèze [13] et écoute des enregistrements au Musée National des Arts et Traditions Populaires. D’autres liront les ouvrages consacrés aux contes, des folkloristes aux ethnologues, des psychanalystes aux critiques littéraires, et les compilations de contes du monde entier seront régulièrement parcourues. Le rapport à la matière est livresque, et ces interprètes-conteurs ne se sentent pas, dans les premiers temps, tenus par des principes de « mise en scène », chacun abordant cette matière avec sa sensibilité et sa formation d’origine. Les particularités du conte comme lien social intergénérationnel ayant un langage propre leur sont révélées par des conteurs de tradition, principalement issus des communautés immigrées, d’Afrique essentiellement, mais aussi de la communauté juive où le lien avec l’oral est toujours vivant.

Naître, exister et s’affirmer conteur de profession


Ces futurs artistes pensent la relation à la matière de façon professionnelle, ils imposent le terme « conteur » tout en inventant un nouveau métier. Ils acquièrent une connaissance littéraire et scientifique du genre et se construisent une identité auprès des bibliothécaires en intervenant, notamment, dans des cadres et des structures déjà existantes comme « L’heure du conte », l’association « La joie par les livres », « L’Age d’or de France » ou la bibliothèque « L’heure joyeuse ». Artisans de leur profession, ils vont œuvrer pour la reconnaissance de leur statut auprès des collectivités publiques tout en entretenant des liens privilégiés avec des centres de recherches et des chercheurs en littérature orale. Du champ expérimental où ils placent la parole contée, ils deviennent en même temps organisateurs de nombreux festivals, rencontres et séminaires de Vannes à Montpellier, de Clamart à Grenoble, d’Avignon à Chevilly-Larue et Créteil. Pendant une vingtaine d’années, ils vont solliciter, inviter, interroger les chercheurs de terrain et les analystes du sujet sur l’art du conte et ses fonctions dans une société donnée. En deux décennies le phénomène se structure, des centres dédiés à l’expression contée sont créés et des réseaux liant centres, festivals et associations donnent corps à cette première génération de professionnels. Deux pôles se dessinent : Chevilly-Larue avec l’organisation d’un premier festival en 1980 et l’ouverture de la « Maison du conte » en 1993 ; Chartres et la création, en 1981, du « Centre de Littérature Orale » (CLiO) [14].

Au sein de ces structures, ces « nouveaux conteurs » développent une réflexion sur leur place dans le monde contemporain, leur statut professionnel et la définition de leur art. Le travail artistique qu’ils développent puise dans l’ensemble des arts de la scène. Cependant, voulant rompre avec le théâtre, ils forgent une nouvelle terminologie : « les arts du récits ». Ces centres sont régulièrement animés par des stages qui autorisent une diffusion du savoir sur les techniques de communication et imposent ces artistes, professionnels de la parole contée, comme interlocuteurs privilégiés pour des formations spécifiques auprès des métiers liés à l’enseignement, à l’éducation sociale, aux bibliothèques mais aussi auprès de toute personne ayant le désir de devenir « conteur ». En accompagnement de ce mouvement et de façon tout à fait naturelle, directement liées à la volonté d’affirmer leur existence et à la recherche de publics nouveaux, des revues spécialisées sur le conte, dirigées et alimentées par les conteurs professionnels, voient le jour [15]. On y trouve des articles de chercheurs, de conteurs professionnels qui donnent leurs opinions documentées sur des éléments de contes traditionnels ou sur des techniques de “contage”, des biographies et des autobiographies de conteurs professionnels. Enfin, des annonces de publications, colloques et festivals clôturent l’ensemble des champs. Ces revues sont aussi le reflet d’un monde professionnel qui se construit et s’élargit à l’espace francophone.

La fréquentation des médias nationaux poursuit cette volonté d’affirmer l’existence d’une expression artistique particulière. A partir de 1979, France Culture leur ouvre ses ondes [16]. Certains conteurs professionnels, à l’image de Bruno de La Salle, sont les animateurs de ces émissions. Ils invitent des chercheurs mais aussi et surtout l’ensemble des conteurs professionnels du moment. A partir de 1985 et pour quelques années, les « Arts du Récits (CLiO) » organisent une semaine d’animations sur le conte dans le cadre du Festival International de Radio France et de Montpellier (extrait de l’avant-programme, ill. 10). Les programmes annoncent des spectacles et quelques conférences où sont conviés des chercheurs et des artistes. Enfin, en 1987, « Arts du Récits (CLiO) » est reconnu structure d’intérêt national par la Direction du Théâtre et des Spectacles du Ministère de la Culture.

En 20 ans, le mouvement des conteurs professionnels s’est structuré et a gagné une visibilité nationale. Le colloque organisé par Geneviève Calame-Griaule au Musée des ATP en 1989, Le renouveau du conte. The Revival of Storytelling, marque un tournant dans les relations chercheurs/conteurs professionnels. Si dans le comité d’organisation nous retrouvons bibliothécaires, chercheurs et conteurs comme Evelyne Cévin, Jean-Noël Pelen et Abbi Patrix, dans les différents moments du colloque et dans l’édition des actes (1991), on note que les conteurs professionnels s’éloignent des chercheurs en faisant le point sur leur mouvement et en auto-analysant leur démarche, comme le souligne Abbi Patrix :

« Je pense qu’il y a vraiment un hiatus entre les gens qui pensent que le conteur est quelqu’un qui sait quelque chose qu’il transmet aux autres, qu’il connaît des histoires qu’il raconte à ceux qui ne les connaissent pas (aujourd’hui ce n’est pas du tout le cas), et ceux qui pensent qu’il y a des gens qui ont la capacité, en racontant, d’évoquer un mystère, de manière vibrante, et du coup, de créer une sorte d’aspiration magnétique de l’intérêt de ceux qui l’écoutent » (in Calame-Griaule, 1991 : 296).



C’est tout le débat entre le fond et la forme, entre la filiation et l’appropriation qui revient à poser la définition du terme de conteur aujourd’hui, définition avec laquelle les conteurs professionnels ont beaucoup de mal.

Redéfinir le terme conteur, trouver l’origine de la profession


Les savoir-faire sont au cœur de la profession de conteur et c’est par eux qu’ils s’imposent. Stages et revues spécialisées sont des espaces où les conteurs professionnels, à la renommée aujourd’hui internationale, exposent ce que nous pourrions nommer leur « introspection gestative » des sons, des mots des textes avant qu’ils ne deviennent « contes » et invitent stagiaires et lecteurs à les suivre dans la mise en place de cet art. Leur travail, dans l’exploration de ce qu’ils nomment « art du récit » ou « art de la parole », se nourrit bien souvent, et à leur corps défendant, d’expressions théâtrales. Abbi Patrix, au sein du « Labo » à la Maison du conte de Chevilly-Larue [17], impose aux apprentis conteurs le travail du corps et de la voix, l’improvisation, le rapport à l’espace et au public qui puisent dans sa formation première d’acteur formé au théâtre expérimental.

Quant au conte de tradition, il n’est abordé, dans les programmes de stage [18], que par certains aspects techniques étudiés et analysés par des chercheurs de terrain, notamment la mémorisation. Une de ces techniques, la mémoire en images, a été révélée et étudiée par la chercheuse québécoise Vivian Labrie (1978). Travaillant avec les conteurs de tradition de Tracadie (Nouveau-Brunswick, Canada), elle remarque qu’ils ont une façon de visualiser, de mettre en images voire de dessiner le parcours du héros dans un récit. Cette technique est réinvestie par les conteurs professionnels qui l’adaptent à leur public de stagiaires. Si le rapport à l’oralité traditionnelle n’est plus là, le lien avec une technicité traditionnelle est recherché. Elle pourrait même apparaître comme la garante de ce qui fait qu’un conteur professionnel puisse y trouver son identité spécifique afin de ne pas être assimilé à un acteur de théâtre (illustration 11). En effet, les écrits produits par ces artistes affichent un certain malaise dès qu’ils doivent donner une définition de leur statut professionnel. Ce malaise découle de la conception classique du terme « conteur » qui souligne les qualités oratoires d’une personne sans en noter le caractère professionnel. Pour essayer de surmonter ce malaise, les conteurs professionnels vont œuvrer dans deux directions : dans la construction d’une représentation historique du métier de conteur et dans un travail de terrain auprès des collectivités locales.

La conception historique d’un conteur de profession est issue d’une réflexion de la conteuse multifaces Edith Montelle qui dans « Histoire du métier de conteur » (1996) projette le lecteur dans un temps très lointain. Les figures des bardes antiques, celtes d’Irlande et du Pays de Galles, ouvrent le grand théâtre de l’oralité. Puis viennent les jongleurs, les ménestrels, les trouvères et les troubadours qui, sans aucune distinction de statuts, d’époques et de langues, sont reclassés « conteurs professionnels », mais populaires ! Enfin, nous apprenons l’existence d’écoles de conteurs ayant été fermées en France à la fin du XVe siècle, suite à l’invention de Gutenberg. Ce très surprenant article expose une interprétation néo-romantique de l’origine de la profession. On peut également y relever une pointe ossianique qui s’exprime par un détournement de l’histoire des civilisations et de l’histoire littéraire au profit d’une idée : imposer l’image d’un conteur professionnel en France, voire en Europe de l’Ouest, dont l’origine remonterait à la nuit des temps. Cette représentation fantasmée, et très populaire, du troubadour se retrouve chez d’autres conteurs professionnels comme Abbi Patrix. Appelé à s’exprimer, en 2011, sur l’origine des contes et des conteurs, une partie de sa réponse nous ramène vers l’image du troubadour :

« Le troubadour, à la fin du Moyen-Age, est la dernière trace de tradition orale artistique professionnelle dans notre culture européenne. Alors que cela s’est perpétué en Afrique, en Inde, en Chine. Nous avons connu quatre cents ans de rupture. L’oralité a été mise à mal, interdite, puis est partie ailleurs, dans d’autres formes artistiques » (2011 : 14).



Les analystes de la littérature du Moyen Âge ont montré depuis bien longtemps que les troubadours sont issus d’une grande tradition écrite aristocratique de composition poétique et musicale, loin des canons de l’oralité (Bec, 1992). La mention d’aires culturelles lointaines brouille les lignes et induit une interprétation de l’universalité du métier de conteur, bien présent sur certains continents et perdu depuis quatre cents ans en France. Nous sommes ici dans la construction d’un discours et dans la production d’images visant à légitimer le mouvement des conteurs professionnels. Or les hommes et les femmes qui composent ce mouvement sont les acteurs de leur histoire. Leur soif d’exister crée une nouvelle catégorie dans les arts du spectacle. Leurs lectures, leurs recherches et leurs confrontations avec cette matière qu’est le conte, les poussent à extraire ce qui est particulier dans la pratique de cet art. La construction de l’origine supposée du « métier de conteur » souligne leur besoin de légitimer leur action.

En dehors de cette construction des origines, le mouvement des conteurs professionnels a senti très tôt le besoin de se structurer. En 1988 est créée l’ANCEF (Association Nationale des conteurs d’En France) qui souhaite regrouper l’ensemble des praticiens du conte et travaille à donner une visibilité nationale au mouvement tout en le structurant de l’intérieur. En 1996, sous la houlette du conteur professionnel Michel Hindenoch, une « Charte des conteurs » est proposée [19]. Elle provoque des débats mais fait toujours référence. Elle a le grand mérite d’exposer une démarche collective et déontologique du mouvement. Elle fait aussi apparaître trois catégories de conteurs : les professionnels, les semi-professionnels et les amateurs. Comme le souligne Soazig Hernandez (2006), cette organisation pyramidale est le reflet du chemin que tout individu doit suivre pour devenir un acteur reconnu du conte. Elle montre que l’intégration au réseau des professionnels des arts de la parole se traduit par l’obtention du statut d’intermittent du spectacle. Hors statut, l’individu ne peut être considéré conteur. Cette charte et l’affirmation de ces trois états du mouvement poursuivent l’élargissement de la définition du terme de « conteur » en affirmant son caractère professionnel. Cette représentation est aussi un écho de la réalité du conte contemporain avec des professionnels qui encadrent de futurs intermittents et assurent des stages pour un vivier important d’amateurs. Même si cette organisation du mouvement est l’objet de discussions houleuses entre praticiens du conte, elle donne à voir une image rassurante et fiable aux directions de la culture des collectivités territoriales, à la Direction générale de la création artistique du Ministère de la Culture et à ses services en région (DRAC).

Une filière du conte


A observer le phénomène de ce qu’aujourd’hui on appelle communément le renouveau du conte en France, nous pouvons dire qu’il existe actuellement une filière du conte à l’image d’une filière du livre avec des centres en région comme La Maison du conte à Chevilly-Larue, CLiO Conservatoire contemporain de Littérature Orale/Les Arts du récits à Vendôme, Le Centre des Arts du Récits en Isère à Grenoble, le Centre Méditerranéen de Littérature Orale (CMLO) à Alès, qui sont à la fois centres de ressources, centres de formation, lieux expérimentaux sur la parole contée ; qui éditent les productions tant sonores qu’écrites de leurs membres, qui aident à la création, à la programmation et à l’organisation de spectacles comme de colloques dont les intervenants sont en grande majorité des conteurs professionnels. Des sites internet sont liés à chacun de ces centres [20]. Ils permettent de diffuser de l’information sur les spectacles des différents conteurs associés aux structures et d’annoncer toutes les activités que ces dernières développent durant une année civile. En 2001 a été créé Mondoral : portail du conte et des arts de la parole [21], qui fédère l’ensemble des structures associatives professionnelles et travaille pour la construction d’un véritable réseau national en accompagnant différents projets portés par les centres précédemment cités, en renvoyant sur leurs sites et en ouvrant sur des rencontres et des productions internationales autour du conte (illustration 12). Cette fédération a été renforcée en 2010 par la création de l’APAC (Association Professionnelle des Artistes Conteurs) [22] qui, de nouveau, tente de redéfinir la place du conteur professionnel dans la société et dans ses relations avec ses bailleurs de fonds, notamment la Direction Générale de la Création Artistique.

Des festivals de renommée nationale ou internationale finissent d’affirmer la présence incontournable de ces professionnels de la parole mise en spectacle. Nous ne citerons que Le nombril du monde à Pougne-Hérisson (Deux-Sèvres), Gustave, Les allumés du verbe (organisateurs de festivals et manifestations dans les Landes et en Gironde), Paroles Traverses/Mythos à Rennes, Festival interculturel du conte/« Paroles de conteurs » à Vassivière (Limousin) [23].

Au fil des années, cette filière du conte est devenue l’interlocutrice privilégiée des métiers du livre, des métiers de l’enseignement mais aussi du Ministère de la Culture, de ses directions régionales et des services culturels des diverses collectivités. Henri Touati, directeur du Centre des Arts du Récit en Isère, est chargé, en 2000, par le Ministère de la Culture (Direction de la Musique, de la Danse, du Théâtre et des Spectacles), sous la responsabilité de l’AGECIF, d’établir un état des lieux sur L’art du récit en France (Touati, 2000) [24]. Accompagné des précautions d’usage, l’auteur du rapport signale, dans l’avertissement, que cette étude « a été l’occasion […] d’avancer un certain nombre de préconisations à l’adresse du ministère en charge de la culture » (Touati, 2000 : 2). Si ce rapport fait un état des lieux de la réalité de la pratique du conte en France à l’aube du XXIe siècle, nous pouvons remarquer, en introduction, l’affirmation de la filiation construite du conteur professionnel qui va de l’aède, en passant par le troubadour jusqu’au paysan du XIXe siècle. Sa lecture nous donne à comprendre la conception qu’ont les conteurs contemporains de la situation du conte en France avec d’un coté les collecteurs qui poursuivent leur travail de terrain à l’écoute d’une tradition qui n’en finit plus de mourir et les acteurs du conte professionnel qui se “bricolent” un métier et créent les conditions de sa viabilité. En annexe, se trouve mentionné un ensemble impressionnant de festivals émaillant l’ensemble du territoire national. Ce que ne montre pas ce rapport, c’est l’existence des conteurs de tradition publique et les scènes qui les accueillent. Notre travail de terrain nous a amenée, depuis fort longtemps, à fréquenter ces scènes “inconnues” et à observer les conteurs qui s’y produisent. Ainsi, la Hesteyade d’Ibos [25] (Hautes-Pyrénées) et le Festival de Siros  [26] (Pyrénées-Atlantiques) en sont, en 2012, à leur 35e édition pour le premier et 45e pour le second. Que ces festivals soient difficilement repérables, nous voulons bien le concéder, mais ils sont connus et incontournables dans leurs départements respectifs. Il en va de même en Bretagne avec le très populaire festival de la Baugue d’or [27] qui, lui aussi absent de cette liste, fête en 2012 sa 37e édition (illustration 13). Dès lors, nous sommes en droit de croire que bien d’autres scènes régionales n’ont pas été repérées. Une explication de cette constatation peut se lire à travers les organismes supports des manifestations présentées. Ils sont tous, de près ou de loin, affiliés au réseau des conteurs professionnels, bibliothèques, médiathèques, Fédération des Œuvres Laïques, Fédération des Foyers Ruraux, municipalités et conseils généraux (par le biais de leur direction de la culture) et structures associatives diverses. Tout concourt ainsi à penser que la rédaction de ce rapport par un directeur de centre de conte tend, sans le dire, à mettre en avant uniquement ce qui dépend des réseaux des conteurs professionnels. Ce texte est par ailleurs téléchargeable sur le site de la Documentation française [28], ressource pour les agents territoriaux, pour les candidats des concours de la fonction publique territoriale, futurs cadres de la culture et du développement territorial. Une certaine définition du conte et des conteurs s’impose donc au niveau des structures de l’appareil culturel de l’État.

Les conteurs professionnels ont façonné une représentation archétypale du conteur d’aujourd’hui, portrait qui ne correspond pas, bien sûr, aux différentes réalités du terrain. Cependant, cette description du monde du conte s’impose de manière si puissante auprès des interlocuteurs cités précédemment qu’elle peut parfois faire mettre en doute les discours des chercheurs qui travaillent sur d’autres expressions du conte. Quant aux conteurs publics de tradition, ils ne rentrent pas dans les cadres aujourd’hui établis par les différents services culturels et la qualité de « conteur » leur est contestée. Un écran s’est dressé séparant les conteurs professionnels et les directions de l’action culturelle des différentes collectivités d’avec les représentants d’une oralité publique traditionnelle.

Les conteurs face au Patrimoine Culturel Immatériel


Dès lors, comment envisager le monde des conteurs et la notion de Patrimoine Culturel Immatériel (PCI) ? Nous n’entrerons pas dans un débat épistémologique sur cette notion récemment arrivée dans le champ des patrimoines (Bortolotto, 2011) mais nous la considérerons par rapport à la définition qui en est donnée par l’UNESCO qui, dans le champ de la recherche, redistribue les places dévolues aux chercheurs et aux témoins tout en engageant l’Etat signataire à produire un inventaire.

Le PCI et “la communauté”


En 2003, l’UNESCO propose une convention pour la « Sauvegarde du Patrimoine culturel Immatériel » [29] dont l’article 2 donne une définition. Si le préambule livre une vision large de ce patrimoine touchant l’ensemble des actes de la vie quotidienne, la première phrase introductive se conclut sur l’identification de ce qui fait patrimoine dans un groupe donné. Cette identification est uniquement dévolue aux « communautés, groupes et le cas échéant aux individus ». On a donc une désignation endogène et non exogène du patrimoine culturel immatériel. La seconde phrase, quant à elle, souligne la filiation dynamique de la transmission de ce patrimoine, « de génération en génération, [il] est recréé en permanence par les communautés et groupes », cette filiation étant liée « au sentiment d’identité et de continuité ». Suivent des exemples dont « les traditions et expressions orales » et « les arts du spectacles ». Chaque Etat signataire doit s’engager à établir « de façon adaptée à sa situation, un ou plusieurs inventaires du patrimoine culturel immatériel présent sur son territoire » (article 12). Les articles 13 et 14 développent les conditions que tout Etat doit mettre en place pour « assurer la sauvegarde, le développement et la mise en valeur » dudit patrimoine. L’élément central de cette convention, et qui en est le ressort dynamique, est la primauté des communautés dans le processus d’identification du patrimoine par rapport, notamment, aux scientifiques, clause à l’origine de réactions tranchées chez ces derniers (Hottin, 2011).

Pendant les trois années qui ont séparé la publication du texte de sa ratification par la France, des rencontres annuelles ont été organisées à la Maison des cultures du monde sous la houlette de Chérif Khaznadar (2011). Elles ont proposé une approche didactique de la notion en rassemblant des spécialistes en sciences humaines, des acteurs de ce texte au sein de l’UNESCO et des cadres du ministère de la Culture. Après ratification, la Mission à l’Ethnologie a été chargée de la mise en place de l’inventaire du PCI. Cet inventaire a pris deux directions successives : un inventaire des inventaires qui a permis de faire le point sur les travaux existants, et l’élaboration d’un inventaire des pratiques contemporaines où ont été proposées une méthodologie et une fiche d’inventaire (Grenet, 2011). Les fiches réalisées issues des travaux en cours sont aujourd’hui visibles sur le site du Ministère, à la rubrique « Disciplines et secteurs » [30].

Le texte cadre de l’UNESCO s’appuie donc sur les communautés, mais comment les définir sans remettre en cause les fondements de la République ? Frédéric Maguet (2011) nous engage à revisiter cette notion et à considérer, parmi les groupes qui créaient du lien social, les « communautés de praticiens ». Ces communautés ont conscience de posséder un savoir commun qui fonde leur existence. C’est sous cet angle-là que nous considèrerons le groupe des conteurs en relevant des nuances et en observant leurs positionnements par rapport au travail réalisé, en France, sur le Patrimoine Culturel Immatériel.

Se saisir de la tribune


Des deux groupes de conteurs que nous venons de présenter un seul, celui des conteurs professionnels, s’est immédiatement manifesté dès que la convention de l’UNESCO a été publiée. C’est donc tout naturellement que nous retrouvons Bruno de La Salle identifié « Conteur, Directeur artistique du centre de Littérature Orale (CLiO) », proposant un exposé sur « Patrimoine Culturel immatériel et oralité », lors de la première journée du PCI en France, le 6 avril 2004, à la Maison des Cultures du Monde. Il est remarquable que, parmi toutes les personnes invitées, scientifiques, agents de l’Etat et représentants de l’UNESCO, Bruno de La Salle eût été le seul “praticien”. Placé ainsi, il peut endosser le rôle de représentant d’une communauté, celle des conteurs, ce qui nous inscrirait donc dans le respect du texte : ce sont les praticiens qui s’expriment sur leur pratique en dehors de toute intervention scientifique ou institutionnelle. Cependant, nous sommes en droit de nous interroger sur la filiation de ce patrimoine conté. Est-il vraiment « transmis de génération en génération » ? La réponse est complexe. Parmi les conteurs professionnels, peu d’entre eux sont en filiation directe et ceux qui le sont, sont, pour la plupart, issus de communautés immigrées. Ce problème de la transmission intergénérationnelle se retrouve, en creux, l’année suivante, en 2005, exprimé, toujours par Bruno de La Salle, lors des secondes journées sur le PCI à la Maison des Cultures du Monde [31]. N’étant pas invité mais spectateur, il prend la parole et affirme que sur la question du conte, les conteurs traditionnels ont tous disparu au XIXe siècle tout en soulignant qu’on ne parlerait plus de conte en France si lui et ses collègues n’avaient pas relancé cette « tradition » ; affirmation stratégique qui le place comme seul interlocuteur pour parler de la réalité du conte en France aujourd’hui face à des instances nationales et internationales. Par ailleurs, cette temporalité de la disparition affirmée des conteurs correspond effectivement aux grands moments de la collecte en France. Un trouble s’installe donc dans l’identification du conteur. Est-ce celui qui a été collecté ou est-ce le folkloriste qui a publié le fruit de son travail ? En restant sur cette position floue, Bruno de La Salle écarte les collectes contemporaines et les autres pratiques de conte qui existent en dehors du phénomène professionnel. Cette temporalité s’est aujourd’hui réduite et en 2007, nous pouvions lire, sur le site du CLiO, à la rubrique « Activités internationales », annonçant le déplacement de B. de La Salle en Pologne, que « le métier de conteur avait disparu durant le XXe siècle » [32]. Ce réajustement a été confirmé lors des « 4e rencontres professionnelles du conte en région Centre » des 9 et 10 février 2012 :

« L’assemblée se questionne ensuite sur la notion d’œuvre. Il ressort des échanges que le conteur est auteur et interprète. Une coupure s’est opérée dans les années 50, les conteurs traditionnels ont disparu. Ce sont les livres qui ont gardé la trace de leurs paroles. Les conteurs d’aujourd’hui la font revivre grâce aux écrits. Ils sont, en ce sens, auteurs car ils réécrivent les histoires pour les adapter au monde contemporain et s’en font les interprètes lorsqu’ils les transmettent oralement » [33].



A suivre ces lignes, nous sommes toujours dans “l’image filée” de la disparition du conteur traditionnel qui, par un glissement naturel, est remplacé par le conteur professionnel. Nous sommes également toujours en présence du livre, lieu et objet d’une matière inerte sur lequel s’invente une profession de l’oralité.

Le mouvement des conteurs professionnels répond en partie à la définition donnée par l’UNESCO de ce qu’est le PCI. C’est donc en acteurs de la matière contée qu’ils se placent dans des dispositifs décisionnels pour une reconnaissance internationale. La seule ombre à ce tableau parfait est bien celle de la transmission directe. C’est ainsi que la rhétorique sur la mort de la tradition et l’avancée du livre comme lien de l’oralité peut donner l’illusion d’une filiation ininterrompue du conte.

L’inventaire : entre chercheurs et acteurs


Dans les dispositifs définis par l’UNESCO, tout Etat ratifiant la convention doit produire un inventaire des pratiques relevant du PCI sur son territoire. Cet inventaire, réalisé par des scientifiques et/ou des associatifs, est actif depuis 2007 en France et alimente régulièrement la base de données consultable sur le site du Ministère de la Culture. Dans la rubrique « Inventaire en France », nous nous arrêterons sur deux entrées : « Le répertoire des inventaires » et « Inventaire ». La première des deux entrées « recense des inventaires d’éléments du patrimoine culturel immatériel portant sur des thèmes ou des zones géographiques particuliers » [34]. On y trouve cinq items concernant le conte : deux d’entre eux centrés sur la conservation de collectes patrimoniales et attachés à des fonds d’une agence culturelle départementale ; et trois concernant directement la pratique du conte actuel. Sous les intitulés « Contes populaires », « Contes de tradition orale » et « Traditions orales en France », nous retrouvons les mêmes structures : CLiO, Les Arts du Récit, La Maison du Conte de Chevilly Larue et la fédération des associations et festivals, Mondoral. Les fiches mettent en avant les centres de documentation et les moteurs de recherche qui permettent d’avoir accès tant à l’annuaire professionnel des conteurs adhérents à ces structures qu’à l’ensemble de leurs activités. La rubrique « politique de sauvegarde » présente les programmes de formation, de stages et les possibilités d’accueil d’artistes en résidence. Selon la même logique précédemment explicitée, sous le couvert d’une filiation avec la tradition orale, nous sommes confrontés à des artistes qui, au niveau du Ministère, se positionnent en tant que représentants de l’ensemble des pratiques orales en France (illustration 14 et illustration 15).

La rubrique « Inventaire » [35] quant à elle aborde le monde du conte par un autre biais. Elle est le résultat de travaux menés sur le territoire par des chercheurs et/ou des associations missionnés par le Ministère et rassemble des fiches présentant succinctement des pratiques et des savoir-faire. L’inventaire de terrain débutant, il est en évolution perpétuelle. Une entrée de cette rubrique est consacrée à « L’art du conte ». Trois documents y sont déposés dont deux concernent la pratique du conte. Les intitulés de ces deux documents centrent la problématique sur une aire départementale avec un axe linguistique, l’occitan. La lecture des fiches présente un tableau concis de la pratique et de sa filiation, tout en soulignant la variété des répertoires. Dans ce travail, réalisé par une chercheuse pour un organisme missionné par le Ministère, nous avons une description de la pratique du conte qui s’apparente avec ce que nous trouvons sur notre terrain d’observation. Sont notés : une présence attestée, depuis le XIXe siècle, du conte public inscrit dans des réseaux d’interconnaissance ; une dominante du registre facétieux à travers le temps ; une évolution de la pratique en adéquation avec l’évolution de la société, de la veillée de village aux festivals de culture régionale, aux émissions de radio, et à la production d’ouvrages et d’enregistrements commercialisés, jusqu’au site Internet pour certains d’entre eux. En une vingtaine de lignes sont exposés un siècle et demi de pratiques de conte public. Quant aux praticiens actuels qui sont aussi l’objet de ces fiches, ils exposent la variété des situations, de l’amateur à la renommée restreinte au professionnel à la carrière internationale en passant par les amateurs reconnus régionalement. Leurs formations de praticiens du conte, ils les tiennent par filiation directe et non par la fréquentation de stages.

Il est intéressant de remarquer que sur un même site consacré à l’identification du PCI en France nous avons deux positionnements différents. Un groupe de praticiens professionnels, en entrant dans les cadres de la définition proposée par l’UNESCO, se saisit de l’opportunité pour affirmer son champ d’action auprès du Ministère. En même temps, l’inventaire des pratiques vivantes fait émerger le discours de chercheurs de terrain et de structures associatives qui donnent une image différenciée de la pratique du conte. Mais ce ne sont pas, ici, les praticiens qui s’expriment directement ; ce sont des « tiers » qui récolent les informations pour le compte du Ministère. Le paramètre langue comme vecteur du PCI, inscrit dans la convention, permet une approche plus précise de la pratique contée et dévoile une réalité complexe. Les travaux en cours devraient donner une visibilité fine des pratiques du conte à travers l’ensemble des scènes en France, qu’elles soient d’expression régionale ou non.

Conclusion


La notion de « communautés de conteurs » en France aujourd’hui nous a amenée à confronter des pratiques publiques de conte. Nous avons tenté de montrer une pluralité d’expressions avec des conteurs publics en filiation directe avec une expression traditionnelle de l’oralité en représentation et un mouvement professionnel de conteurs d’émergence, somme toute, récente qui se nourrit de textes, de collectes diverses, d’univers musicaux pour créer des œuvres uniques ; ce mouvement élaborant les conditions de sa structuration et de sa pérennité tout au long de son développement. La convention sur le PCI met en avant la notion de communauté et le traitement des inventaires tel qu’il est réalisé en France s’appuie sur les pratiques et savoir-faire. Dans cette optique, la « communauté de praticiens » la mieux structurée, qui s’impose au premier chef et affirme représenter les « contes de tradition orale en France » est celle des professionnels. L’inventaire du PCI permet d’aller à la rencontre d’autres types de conteurs mais non structurés en association pour lesquels le chercheur, en relevant la pratique, fait émerger une autre « communauté de praticiens ». Cependant, nous sommes ici au cœur du dilemme qui traverse le domaine du PCI, à savoir que c’est la communauté qui désigne son patrimoine et non le chercheur (Bortolotto, 2011). Si nous quittons ce débat pour considérer la richesse des expressions du conte en France aujourd’hui, notre propos de chercheur nous amène à considérer les communautés de conteurs non pas de façon synchronique en professionnels, semi-professionnels et amateurs mais de façon diachronique, avec une transmission directe de pratiques orales en contexte informel et une transmission formelle de pratiques artistiques par le biais de stages et autres ateliers professionnels. Organisé ainsi, il est aisé d’affirmer qu’aujourd’hui, il existe toujours une transmission informelle des pratiques contées comme il existe un courant artistique qui formalise une vision et une expression de la littérature orale.

add_to_photos Notes

[1Ce sud Gascogne comprend les départements des Landes, Gers, Pyrénées-Atlantiques et Hautes-Pyrénées.

[2Même si J.-F. Bladé fut gratifié du titre de Majoral par le mouvement félibréen, il s’en sera toujours tenu à l’écart à l’image de l’ensemble des folkloristes. Sûrs de leur statut de scientifiques, ils se sont toujours mis en marge de ces mouvements littéraires et identitaires qui se structurent en France durant le dernier quart du XIXe siècle.

[31967, Festival de la culture béarnaise et gasconne à Siros (Pyrénées-Atlantiques) ; 1975, Hestau gascon de Las Aigas à Eugénie-les-Bains (Landes) ; 1976, Festival du conte gascon à Sauboires (Gers) ; 1978, La Hesteyade à Ibos (Hautes-Pyrénées) et Era hesto gascouno à Saint-Gaudens (Haute-Garonne).

[4Principalement le label Junqué-oc à Jurançon (Pyrénées-Atlantiques) qui de 1967 à 1990 a, entre autre, enregistré et diffusé un certain nombre de conteurs publics de tradition dans « Collection du rire occitan ». Le label Agorila, basé sur Bayonne, se placera sur le même créneau à partir de 1975 et continue toujours d’accueillir des conteurs de ces scènes.

[6http://www.youtube.com/watch?v=CLp5e3hg3Bc (consulté le 28 août 2012).

[7http://capetot.blogspot.fr/ (consulté le 13 avril 2012).

[9http://piquirineu.blogspot.fr/ (consulté le 13 avril 2012).

[12Bruno de La Salle, témoin principal de l’article de Veronika Görög-Karady, est un des premiers artistes à expérimenter la parole contée mise en spectacle. Grand animateur du mouvement du « renouveau du conte », créateur de plusieurs spectacles et auteur de plusieurs livres, il est le directeur fondateur du « Conservatoire contemporain de Littérature Orale » (CLiO).

[13Marie-Louise Tenèze a succédé à Paul Delarue dans la direction du Catalogue du conte populaire français qui se trouvait au musée des ATP jusqu’au départ de cette dernière, dans les années 1990. Aujourd’hui, ce catalogue se trouve au centre d’Anthropologie de Toulouse, sous la direction de Josiane Bru.

[14Aujourd’hui le CLiO a été renommé « Conservatoire contemporain de Littérature Orale » et se trouve à Vendôme. Cette nouvelle appellation souligne la recherche d’adéquation entre la matière contée et ce qu’en font ces artistes.

[15Ouir-Dire (1978), Dire. Revue du conte et de l’oralité (1987-1995), La Grande Oreille. La revue des arts de la parole (1999, http://www.lagrandeoreille.com/ : consulté le 5 septembre 2012).

[16A partir de 1973, sur France-Inter, avec Claude Villers, Henri Gougaud animait une émission centrée sur les récits de tradition orale et de science-fiction.

[17http://www.lamaisonduconte.com/ (consulté le 10 septembre 2012).

[18http://www.catherine-zarcate.com/Stage-contes.html, http://www.atelierahistoires.fr/spip.php?article17 (consultés le 10 septembre 2012), pour n’en citer que deux.

[21http://www.mondoral.org/ (consulté le 26 août 2012). Mondoral se définit comme « Fédération pour la promotion et le développement des arts de la parole avec les soutiens du Ministère de la Culture et de la Communication (Direction de la musique, de la danse, du théâtre et de spectacles — Délégation générale à la langue française et aux langues de France — Direction du livre et de la lecture — Direction régionale des affaires culturelles Centre). Elle est dirigée par Henri Touati, également directeur du Centre des arts du récit.

[22http://conteurspro.fr/ (consulté le 15 septembre 2012).

[25http://hesteyadebigorre.e-monsite.com/ (consulté le 10 août 2012).

[26http://festivaldesiros.wifeo.com/ (consulté le 10 août 2012).

[27http://www.gcbpv.org/?page_id=108 (consulté le 10 août 2012).

[29http://www.unesco.org/culture/ich/index.php?lg=fr&pg=00002 (consulté le 15 septembre 2012).

[31Le 22 mars 2005.

[32« Comme ailleurs en Europe, le métier de conteur a disparu durant le XXème siècle mais il existe aujourd’hui un véritable désir de raconter et de transmettre le patrimoine oral traditionnel par le biais de spectacles. Fort de l’expérience acquise dans des conditions similaires en France, l’objectif du CLiO est d’accompagner un renouveau du conte en Pologne et d’aider à l’émergence d’une nouvelle génération de conteurs professionnels polonais » (consulté le 25 septembre 2007).

[33http://www.clio.org/evenements/rencontrepro/ (consulté le 7 septembre 2012). Ces rencontres sont organisées par le CLiO et la Direction de la Lecture Publique (DPL) du Cher avec le soutien du Conseil général et de la DRAC Centre.

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Pour citer cet article :

Patricia Heiniger-Casteret, 2013. « Les “communautés” de conteurs ». ethnographiques.org, Numéro 26 - juillet 2013
Sur les chemins du conte [en ligne].
(https://www.ethnographiques.org/2013/Heiniger-Casteret - consulté le 29.03.2024)
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