Les rituels funéraires civils en France : entre rupture, tradition et négociations

Résumé

Cet article vise à interroger les processus réflexifs à l’œuvre dans l’instauration et le déroulement des rituels funéraires civils, aujourd’hui en France. Pour ce faire, il s’intéresse aux professionnels du funéraire : comment et dans quelle mesure empruntent-ils à la “tradition” ou au contraire cherchent-ils à se démarquer et à innover, notamment dans une logique concurrentielle, pour instaurer dans le cadre des obsèques civiles des pratiques qui doivent néanmoins avoir un sens pour les bénéficiaires ? Mais il s’attache aussi à questionner les négociations que ces derniers opèrent avec les professionnels, et entre eux. Invitant ainsi à considérer cette réflexivité comme au fondement même du rituel.

Abstract

This article questions the reflexive processes at work in the creation and conduct of civil funeral rituals today in France. To do this, it focuses on the funeral business : how and to what extent do funeral professionals borrow from “tradition” or, to the contrary, do they seek to distinguish themselves and innovate within a competitive framework, while nonetheless proposing civil funeral practices that make sense for beneficiaries ? The article also questions negotiations between beneficiaries and professionals suggesting that a certain degree of reflexivity can be seen as the very foundation of the ritual.

Sommaire

Table des matières

Introduction

On ne peut que constater la rupture en matière de rituels funéraires avec la “tradition”. Disparition du faste funéraire, des longs cortèges, du port du deuil, etc., la mort ne s’inscrit plus socialement dans l’espace comme elle le faisait autrefois (Ariès, 1977). Par ailleurs, de nouvelles pratiques ont émergé, telle la crémation, qui est passée de 1,2 % en 1980 à plus de 34,54 % en 2014 [Fig. 1], les soins de thanatopraxie pour la conservation des corps, ou encore le développement des cérémonies civiles [1]. Celles-ci s’inscrivent dans une société marquée par les phénomènes de sécularisation et de marchandisation des pratiques sociales (Thomas, 1975), qui ont conduit à une redistribution des rôles dans la prise en charge des obsèques entre l’Église, les pompes funèbres et les familles.

Fig. 1 : Graphique de l’évolution de la part de crémations en France de 1970 à 2014. [2]

Un certain nombre de tâches, qui étaient traditionnellement réparties entre les membres de la famille et certaines figures de la collectivité locale (veilleurs, prieuses, pleureuses, menuisier, etc.), sont désormais prises en charge par les pompes funèbres (telles que le port du cercueil, des fleurs, la toilette mortuaire, etc.). Alors qu’elles ne s’occupaient que du service dit « extérieur » – par opposition au « service intérieur » dévolu à l’Église –, c’est-à-dire des services et fournitures constituant le faste – la pompe, à l’origine de leur appellation – et permettant le bon déroulement des obsèques (cercueil, tentures, véhicules funéraires, etc.), les pompes funèbres ont développé leurs activités non seulement autour des soins apportés aux défunts (Lemonnier et Trompette, 2010), mais également en matière rituelle. De leur côté, les familles et les proches sont dorénavant partie prenante dans l’organisation des cérémonies d’obsèques, qui fut longtemps l’apanage de l’Église (Dartiguenave et Dziedziczak, 2012 *.]). Mais cette redistribution des rôles laisse entière la question de l’élaboration des rituels, notamment civils.
Ainsi, quels sont les processus réflexifs qui ont conduit et conduisent à l’instauration des obsèques civiles en France, au regard de cette nouvelle répartition des charges qu’elles impliquent ? Et quels sont ceux qui sont à l’œuvre dans le déroulement même du rituel ?
Après un retour historique sur l’émergence des obsèques civiles, permettant de resituer et de reconsidérer la rupture constatée, nous nous intéresserons dans un premier temps aux espaces et aux outils dans et avec lesquels la réflexivité des professionnels du funéraire s’exerce en vue d’instaurer des pratiques qui font sens pour les bénéficiaires, en empruntant à la tradition ou en cherchant à innover afin de se démarquer dans un contexte et une logique concurrentiels.
Les familles et proches des défunts prenant part à l’organisation et au déroulement des obsèques, tant en raison de leur volonté que de l’indétermination des rituels civils qui incite les professionnels à les solliciter, nous nous intéresserons dans un deuxième temps aux négociations qu’ils opèrent avec ces derniers, et entre eux. Notamment, en ce que ces négociations donnent à voir l’enjeu que ces rituels représentent pour les uns et les autres, et ce faisant laissent à penser que la réflexivité est au cœur même du rituel d’obsèques civiles et en constitue le fondement.
Les données mobilisées dans le présent article sont issues d’un travail de thèse [3], toujours en cours, portant sur les conditions sociales de l’instauration des rituels funéraires catholiques et civils et leur prise en charge [4]. Elles ont essentiellement été recueillies par observation directe ou participante, non seulement des obsèques, mais également de leur organisation dans les lieux où il était possible de les appréhender (églises, agences de pompes funèbres, chambres funéraires, cimetières, crématoriums, réunions, etc.). Ces données ont été complétées par des entretiens de type semi-directif avec des professionnels du funéraire, des membres d’associations spécialisées dans l’organisation d’obsèques, des représentants du culte catholique, ainsi que des personnes ayant perdu un proche récemment [5]. Enfin, une attention particulière a été portée aux productions des professionnels du secteur funéraire (plaquettes, livrets, sites internet, presse spécialisée, etc.), en somme aux supports permettant d’entrevoir quelques-unes des « théories indigènes de l’action » (Wendling, 2007 *).
Dans le cadre de cet article, le propos est centré sur les obsèques civiles organisées par des entreprises de pompes funèbres ; les négociations qui ont cours dans le cadre des obsèques catholiques ne seront donc pas abordées ici, non plus que celles qui sont opérées dans le milieu associatif. Si l’on traitera essentiellement des cérémonies qui tiennent une place centrale dans les rituels funéraires civils, rappelons que ces derniers s’étendent à la publicisation de la mort, à la présentation de la dépouille, ou encore aux réceptions en marge de la cérémonie.

L’émergence des obsèques civiles : entre rupture et “tradition”

Par obsèques civiles, il faut entendre celles dont la cérémonie est dite « civile », par opposition aux obsèques religieuses quelles qu’elles soient. La cérémonie civile, qui peut avoir lieu dans une salle omniculte au sein d’une structure funéraire (complexe funéraire ou athanée, crématorium, cimetière, chambre funéraire, etc.) ou directement dans une allée d’un cimetière, quand celui-ci n’est pas doté d’une salle adaptée, peut être suivie d’une crémation ou d’une inhumation. Toutefois, qu’on ne s’y trompe pas, contrairement aux mariages ou baptêmes civils, ce n’est pas l’État civil qui y officie ni l’un de ses représentants :

« Un maire qui marie des époux avec son écharpe tricolore dans la maison commune est légitime. Mais il faut bien avouer que si les élus s’investissent avec en général un certain plaisir dans les mariages, voire des baptêmes républicains ou des célébrations de PACS, ils répugnent généralement à agir dans le domaine des funérailles » (Michaud Nérard, 2014 : 14 *).


Ce sont donc les pompes funèbres [6] qui dans la majorité des cas se chargent de ces cérémonies [7], ce qui conduit d’ailleurs François Michaud Nérard, directeur général des Services funéraires de la ville de Paris, à s’interroger sur leur légitimité (Michaud Nérard, 2014 *) [8].
C’est avec la Révolution française et la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, en 1789, que les obsèques civiles vont pouvoir émerger progressivement, notamment par le truchement des libres-penseurs et de la franc-maçonnerie [9], en Belgique d’abord, puis en France (Lalouette, 1997 ; Ognier, 2013). Ces derniers cherchent à proposer une alternative à l’Église catholique, qui de son côté s’emploie à endiguer la propagation de leurs idées. Les obsèques vont dès lors être instrumentalisées et donner lieu à des négociations féroces, en amont et pendant celles-ci, comme en témoignent les descriptions fines de Lalouette (1997). L’expression « être enterré comme un chien » nous est restée de cette période. Elle désignait ainsi les enterrements civils, jugés indignes pour un être humain doté d’une âme par l’Église catholique, qui décriait leur vacuité. La formule n’est pas sans rappeler également la difficulté que rencontrèrent les républicains dans l’instauration d’un nouveau rituel (Lalouette, 1997).
Historiquement, les obsèques civiles se sont fondamentalement inscrites en rupture avec la “tradition”, notamment religieuse, si bien qu’elles se caractérisaient avant tout par l’absence des différents signes confessionnels et de tout ce qui aurait pu les rappeler (Saint-Ferréol, 1875 : 106). Elles ont donc été construites dans une logique d’opposition, de « ne pas », qui ne suffisait pas à en déterminer le contenu. Néanmoins, l’architecture rituelle restera quasiment identique dans son séquençage, sa mise en scène et son décorum. Comme le souligne un libre-penseur renommé, « il fallait savoir emprunter au clergé “ses ressources de mise en scène” » (Lalouette, 1997 : 359) [10]. En somme, les libres-penseurs vont se contenter d’effacer le contenu religieux et de le remplacer par d’autres référents. C’est qu’il est plus facile de s’approprier un rituel que d’en créer un ex nihilo.
Ces obsèques étaient l’occasion pour les républicains de se réunir, d’échanger et de compter leurs rangs. Il s’agissait d’un acte militant. Après la reconnaissance du droit de réunion en 1881, elles furent de moins en moins fréquentées (Lalouette, 1997). Ce n’est que depuis la résurgence récente de la crémation en France qu’il est de nouveau question d’obsèques civiles, notamment en raison de la conception anticléricale des crématistes [11], même si l’on ne saurait confondre les deux mouvements, l’un concernant le caractère religieux ou non des obsèques, l’autre un mode de traitement du cadavre.
Il convient de préciser que, de nos jours, le recours aux obsèques civiles n’est qu’exceptionnellement le fait d’un engagement militant particulier. L’adjectif « civil » a perdu sa dimension politique, il ne s’agit plus de s’affilier comme les libres-penseurs à un mouvement de pensée, mais bien d’organiser des obsèques en dehors d’une référence religieuse ou politique spécifique, même si certaines peuvent toujours affleurer.
Avec le retour des obsèques civiles, les opérateurs de pompes funèbres se trouvent confrontés aux mêmes difficultés que les libres-penseurs avant eux :

Beaucoup de gens disaient : « quand c’est civil on est enterré comme un chien ». Bon, il se passe rien. […] Quand on arrivait au cimetière, on allait directement à la sépulture, on observait une minute de silence, les gens passaient devant le cercueil pour mettre une fleur ou un peu de terre et on inhumait, terminé, hein. C’était ça. C’était très rare que quelqu’un prenne la parole. […] Et c’est vrai que beaucoup de gens d’ailleurs allaient plutôt vers l’Église, même s’ils n’étaient pas croyants, en décidant d’avoir une cérémonie, en disant « au moins il y aura quelque chose, même si on n’est pas croyant, mais au moins il y aura un peu de musique, il y aura un peu de textes », etc. C’est un peu comme les mariages, il y a des gens qui se marient à l’église, ils ne sont pas croyants, mais bon, pourquoi ? Pour avoir une belle cérémonie.
(Cadre d’une entreprise funéraire)


Et comme les libres-penseurs, les opérateurs de pompes funèbres vont, semble-t-il, s’inspirer de l’Église. Il est possible d’identifier trois séquences rituelles dans les cérémonies civiles, qui ne sont pas en effet sans rappeler de manière simplifiée celles du rituel catholique.

1 – Rites d’ouverture : Accueil du défunt, chant d’entrée, salutation et monition d’ouverture, rite de la lumière et autres rites possibles, rite pénitentiel et prière d’ouverture ;
2 – liturgie de la Parole : 1ère lecture, psaume chanté ou lu, 2ème lecture souvent constituée par l’Évangile, commentaire de la parole, prière universelle introduite et conclue par l’officiant, le « Notre Père » ;
3 – Dernier adieu : invitatoire introduisant un temps de silence, éventuellement quelques paroles exprimées par les proches, chant, gestes de l’aspersion et de l’encensement, oraison du dernier adieu, invitation de l’assemblée au geste d’aspersion si telle est la pratique.

Séquences de la célébration des obsèques catholiques [12]

La première séquence consiste à accueillir l’assemblée et à introduire la cérémonie. L’officiant rappelle l’identité du défunt pour lequel l’assemblée s’est réunie et présente le déroulement de la cérémonie. Cette première séquence est suivie d’un temps de parole lors duquel les proches peuvent évoquer le défunt ou lire des textes préalablement choisis. Lorsqu’il y a plusieurs prises de parole, c’est généralement les membres de la famille qui interviennent en premier ou quelqu’un les représentant, les autres communautés d’appartenance prenant la parole ensuite (amis, travail, associations, etc.). Des musiques ou chansons que le défunt appréciait particulièrement et qui l’évoquent d’une manière ou d’une autre, ou proposées par l’officiant, peuvent être diffusées entre les interventions. La troisième et dernière séquence est celle de l’au revoir au défunt. Après l’avoir annoncée, le maître de cérémonie invite l’assemblée à un temps de recueillement, puis à effectuer un geste d’au revoir (déposer une fleur, s’incliner devant le cercueil ou y apposer une main, etc.) avant de regagner leur place ou la sortie de la salle.
La mise en scène de la séparation avec le défunt, qui clôture la dernière séquence de la cérémonie, varie selon les configurations. Dans le cadre d’une cérémonie en extérieur à proximité de la sépulture, elle consiste en l’inhumation du cercueil. Autrement, l’assemblée formera un cortège pour accompagner le défunt jusqu’à sa dernière demeure où de nouveau la séparation sera ritualisée. Dans le cadre d’une crémation, les différentes possibilités peuvent être regroupées selon deux scénarios : soit ce sont les participants qui sont acteurs de la séparation en se retirant, soit un dispositif est mobilisé pour la créer. Cela peut être un rideau qui se ferme ou une paroi qui se rabat, par exemple, afin de soustraire le cercueil aux regards. On pourra proposer aux familles, selon les crématoriums, d’assister à « la mise à la flamme » à travers une vitre de protection (illustration 1 ; illustration 2) ou par écran interposé. Après la crémation, la remise de l’urne et son devenir pourront également faire l’objet d’une ritualisation.

Fig. 2 et 3 : Salle de visionnage de l’introduction du cercueil du Crématorium de Rennes Métropole à Vern-sur-Seiche.
Photographies : Pauline Dziedziczak, 2010.

Ces différentes séquences peuvent être plus ou moins développées et personnalisées en fonction de la volonté et de l’investissement des proches et des professionnels, mais nous les retrouvons a priori toujours. Chacune d’elles est parfois réduite à l’extrême, notamment la deuxième qui peut s’en tenir à l’unique diffusion d’un extrait sonore, et ne comprendre ni prise de parole ni lecture de texte.
Certains éléments mobilisés semblent tout droit hérités des libres-penseurs : jet d’immortelles ou de terre au cimetière, représentation et intervention des communautés d’appartenance du défunt autres que religieuses (professionnelles, associatives, politiques, amicales, etc.). Les gestes rituels constituant ces séquences ne sont pas non plus sans rapport avec ceux du rituel catholique, tels les gestes d’au revoir au défunt, qui rappellent le geste de bénédiction effectué dans la plupart des communes françaises à la fin des obsèques, à l’église et/ou au cimetière en fonction des régions [13], ou encore le « geste de la lumière », rappelant le baptême dans la cérémonie catholique, qui consiste à allumer des bougies avec le cierge pascal et à les déposer sur le cercueil. Ainsi, Sophie, officiante de cérémonies civiles, explique qu’elle aime bien utiliser des bougies dans les cérémonies : « Je suis très bougie. Dès que je suis arrivée ici, j’ai instauré les bougies. […] j’en mets une sur le côté, parce que j’ai cette disposition ici, et puis j’en mets une sur la petite table près de l’urne. […] Pour moi, ce n’est pas religieux, c’est pour faire un côté intimiste, etc. […] Cette petite lumière qui vacille » (extrait d’entretien). Elle rappelle que ces bougies ne sont pas l’apanage de l’Église. Symboliquement, en les soufflant lors d’un anniversaire, on sacralise le souffle de vie ; or, là, les bougies ne seront pas soufflées. Elles veillent.
Les professionnels des pompes funèbres évoquent volontiers les pratiques de l’Église, même s’ils ne mentionnent pas explicitement ces emprunts. Cette dernière est érigée en modèle à suivre et encore aujourd’hui le besoin de s’y référer se fait sentir. Ainsi pour décrire les cérémonies civiles, les professionnels du funéraire les comparent très fréquemment aux cérémonies catholiques : comme dans une église, « il y a ce pupitre comme là où serait un prêtre. […] La seule chose qu’il n’y a pas à la rigueur c’est l’autel  » (officiant de cérémonies civiles).
Si les libres-penseurs et la population, d’une manière plus générale, reprochaient alors à l’Église son faste, son caractère lugubre, et de ne pas prendre en charge de manière adaptée les familles endeuillées (Pérouas, 1980), on lui reconnaît toujours son savoir en matière rituelle. C’est elle, en effet, qui détient “traditionnellement” dans notre société le savoir-faire en ce domaine, c’est par conséquent d’elle que l’on peut l’acquérir, même si c’est pour mieux se défaire de son idéologie. Ainsi certains gestes ou objets peuvent être empruntés à condition qu’on les investisse d’un sens différent.
L’Église apparaît d’autant plus comme un exemple inspirant que les obsèques catholiques sont “traditionnellement” et culturellement une référence relativement commune en France. Ainsi, bien que la plupart des Français ignorent le sens que l’Église attribue aux différentes mises en scène et aux symboles mobilisés lors des obsèques, il leur est possible de se les approprier. Or l’une des grandes difficultés de l’instauration des rituels tient à la nécessité d’avoir des référents communs, auxquels puisse faire appel un établissement doté d’une mission de service public et devant à ce titre proposer le même service à tout un chacun. Ce qui implique dans une certaine mesure une neutralité idéologique, indépendamment de toute demande explicite de la part de la famille ou des proches [14].
Si les professionnels du funéraire n’hésitent pas à mettre en avant ce qu’ils ont de commun avec l’Église, ils le font également pour mieux s’en distinguer. Ils proposent une alternative à la cérémonie religieuse, même s’il ne s’agit pas pour eux, bien entendu, de tenir un discours anticlérical, comme pouvaient le faire les libres-penseurs, ni même de se positionner comme concurrents. Bien au contraire, ils refusent de se considérer comme tels :

Même s’ils sont de plus en plus présents dans la production et l’offre de services rituels (cérémonies civiles, hommage au cimetière), les pompes funèbres se défendent de revendiquer une quelconque autorité symbolique dans ce domaine, concurrente à celle des prêtres ou officiants religieux notamment (Lemonnier et Trompette, 2010 : 126).
[Les professionnels des services funéraires] ne peuvent s’arroger la mission des représentants des cultes mais ne peuvent exclure la dimension spirituelle des cérémonies qu’ils proposent (Ruellan, 2011 : 60 *) [15].


Les opérateurs des pompes funèbres font valoir aux familles la possibilité qu’ils leur offrent, contrairement aux obsèques à l’église, de faire ce qu’elles veulent : « Vous pouvez prendre n’importe quel texte, non religieux si vous souhaitez qu’il ne soit pas religieux, s’il est religieux ça n’a pas d’importance [16] », « il n’y a pas de norme. La normalisation n’existe pas. Pour nous, on est dans un cas individuel, il n’est pas question de dire à quelqu’un c’est comme ça, comme ça, comme ça. Non » (officiants de cérémonies civiles). Le mot d’ordre est donc : « liberté ». Mais certains, au contraire, insistent sur la présence et l’ordre immuable de certaines séquences pour valoriser l’aspect « rituel » de leur pratique, associé à la répétition d’un usage partagé [17]. Quoi qu’il advienne, face à cette liberté annoncée, dans la pratique, il n’y a pas tant de différences d’une cérémonie à l’autre, comme on pourrait s’y attendre. Sauf exception, elles obéissent globalement toujours à la même trame.
Ainsi, si rupture il y a avec la tradition, notamment catholique, elle demeure relative, car si l’on fait autre chose de cette tradition, on en a bien hérité. Toutefois, qu’il s’agisse d’emprunter ou d’innover, les mutations des pratiques, comme le rôle des opérateurs funéraires, confrontent ces derniers à des questions qui touchent aux techniques, aux symboles, à la déontologie et à leur légitimité.

La réflexivité sur les rituels en contexte concurrentiel

Les professionnels du funéraire ne sont pas sans penser et questionner leurs pratiques, leur production en la matière est d’ailleurs assez importante, pouvant prendre différentes formes (blog, site internet spécialisé, groupes sur les réseaux sociaux, revue professionnelle, article, ouvrage, support de formation, etc.) et s’inscrire dans des optiques totalement différentes en fonction des acteurs et des situations.
Un des premiers enjeux des démarches réflexives menées par les opérateurs en ce qui concerne les rituels funéraires est bien entendu d’améliorer leur service. Le partage d’expériences jugées réussies entre confrères ou collègues au sein de la même entreprise, par le biais des outils numériques, en constitue souvent la base. C’est ainsi que les cérémonies civiles personnalisées se seraient développées au sein des pompes funèbres générales, au Havre :

On s’est retrouvé dans la situation où la famille, elle, elle n’avait rien à proposer évidemment, parce qu’elle ne savait pas comment faire, et puis de l’autre côté il y avait ce président qui voulait faire quelque chose au nom du club et qui ne savait pas comment faire non plus. […] Et puis on a réfléchi à ce que l’on pouvait faire. […] On a organisé en l’espace de 24 h, une cérémonie qui a été, moi j’en garde un souvenir parce que c’est la première qui était comme ça, on avait tous ces joueurs qui étaient en tenue alignés en haie d’honneur, plusieurs centaines de personnes qui étaient venues rendre hommage. On avait choisi un emplacement où il y avait de la place dans le cimetière, on a eu le discours du président, on a eu un membre de la famille qui s’est dit « bah puisque le président parle, moi je voudrais lire un texte qu’il aimait bien ». Il y a un membre de la famille qui a lu un texte d’un auteur classique. Et après, quand les gens sont passés devant le cercueil pour dire un dernier adieu, on a mis « le boléro » de Ravel. Et il y avait tellement de monde, c’était une cassette, on était obligé de la remettre à zéro et de la remettre une deuxième fois. Donc c’était, c’était émouvant, quoi. Et vraiment, voilà, c’était le premier qu’on a fait comme ça. Après, qu’est-ce qu’on a fait ? Bah du coup on s’est dit puisque c’est quelque chose qui a plu, là c’est une cérémonie importante, pourquoi ne pas le faire pour des cérémonies où il y aurait moins de monde, mais où les gens finalement sont confrontés au même problème : c’est civil, il ne se passera rien. Donc, systématiquement, après on a proposé aux gens « bah écoutez, si votre défunt aimait un auteur particulier, un texte ou une chanson, n’hésitez pas à nous le dire parce que nous à ce moment-là ce qu’on peut faire c’est diffuser ».
(Cadre d’une entreprise funéraire).


L’entreprise cherche alors à développer l’idée et la diffuse auprès de l’ensemble de ses employés en les formant à partir de l’expérience rapportée. L’amélioration du rituel va donc consister au départ à lui donner un contenu à partir de ce qu’aimait le défunt. Conscient qu’il peut avoir une part croissante dans l’instauration du rituel, l’opérateur en prend l’initiative auprès des familles. Ces dernières, ne sachant pas ce qui peut être fait et ne disposant pas forcément de référence ou d’exemple à suivre en la matière, sont souvent désemparées et s’en remettent à la seule volonté exprimée par le défunt : « Je ne veux rien » [18]. Pour faciliter la personnalisation des obsèques, des supports sont créés pour proposer des exemples de textes et de musiques, et pallier les inégalités de capital culturel entre les familles :

Vous avez des gens qui n’ont aucune culture musicale, vous avez des gens qui ne lisent pas. Donc on leur a proposé des textes, on leur a proposé des musiques classiques, en leur disant « si vous voulez, si, vous, vous n’en avez pas, nous on peut vous en proposer ».
(Cadre d’une entreprise funéraire).


L’investissement des différents membres du personnel, que les familles rencontrent pour l’organisation du rituel funéraire, est relatif à l’importance qu’ils y accordent dans leur activité professionnelle et aux contraintes qui s’imposent à eux, en termes de délais et de moyens matériels.
L’amélioration de l’offre de service en matière de rituels d’obsèques civiles passe aussi par une attention portée à l’esthétique des cérémonies, à leur mise en scène et aux espaces dans lesquels elles ont lieu, en développant des salles omnicultes par exemple. Des efforts architecturaux sont réalisés, notamment dans les crématoriums, pour penser les parcours, aménager les séparations, etc. Mais il ne faut pas oublier que l’esthétique passe aussi par les détails :

On se regarde, on fait un geste. Rien que ce geste, pof. Par exemple, il a oublié une fleur ou la fleur est tordue… tout à l’heure, c’était la jupe [morceau de tissu élastiqué entourant la base du cercueil pour cacher le support sur lequel il est installé]. Parce qu’ils arrivent, ils saluent, ils ont oublié. Cette jupe, on la lève toujours pour qu’elle ne se prenne pas les pieds dans les roues. Vous l’avez vu, hein ? ! Donc automatiquement, il faut la baisser, pour ne pas voir les roues.
(Porteur).


Les porteurs et maîtres de cérémonie portent une attention très soutenue aux détails, notamment pour se distinguer, avoir leur signature. Cela peut passer par les tenues (gants blancs, casquette, etc.), la manière de réaliser la mise en bière, de porter le cercueil ou encore de saluer l’assemblée. Ils observent la façon dont s’y prennent leurs concurrents pour réajuster leurs propres pratiques à l’aune d’une initiative jugée positive.
Enfin, l’esthétique passe par un perfectionnement des outils, notamment par la mobilisation des nouvelles technologies. On est ainsi passé de la cassette audio, qu’il faut rembobiner, au CD et dernièrement à la clé USB – la présence de musiciens est exceptionnelle. Ces nouveaux outils facilitent la personnalisation de la cérémonie par la diffusion de vidéos ou de photos numérisées sur grand écran. Ils permettent aussi de proposer de nouveaux usages, comme celui de filmer les obsèques par exemple. Pas nécessairement pour garder une trace de celles-ci, mais pour donner la possibilité à des personnes qui n’étaient pas présentes d’y assister, par média interposé, à distance ou ultérieurement.

Fig. 4 : Petite salle de cérémonie du crématorium de Rennes Métropole à Vern-sur-Seiche
Photographie : Pauline Dziedziczak, 2010.

Dans la recherche d’amélioration de la qualité et de l’offre de service, les outils marketing et de relations clients (études de marché, veille concurrentielle et questionnaires qualité, par exemple) sont mobilisés pour réinventer et parfaire ce qui existe ou a déjà existé, mais a été abandonné, en matière d’obsèques civiles en France et dans les pays voisins. Des livrets de cérémonie personnalisés tels qu’ils se font dans le cadre d’obsèques catholiques, en passant par les livres de « Mémoires d’une vie » construits sur le modèle des livres de naissance, à la création d’outils devant faciliter l’entretien avec les membres de la famille et les proches pour l’organisation de la cérémonie, et pouvant éventuellement leur être remis ensuite comme trace des obsèques, la palette des produits commercialisés en marge de la cérémonie [19] est étudiée et remise au goût du jour régulièrement. Il semblerait toutefois qu’aucun d’entre eux ne se soit encore vraiment imposé dans les pratiques.
Dans le cadre de la réflexion critique que les opérateurs funéraires nourrissent sur eux-mêmes, ceux qui en ont les moyens [20] sollicitent régulièrement la communauté scientifique, ainsi que des spécialistes des questions rituelles (prêtres liturgistes par exemple) pour penser et perfectionner leurs pratiques. Que ce soit en finançant des recherches, en organisant et en participant à des colloques, en commandant directement des études ou lors de consultations en réunions internes, les relations entre ces experts et le milieu du funéraire sont relativement importantes. Cette proximité est notamment favorisée par des institutions comme le Comité national d’éthique du funéraire ou encore la Société de thanatologie, qui vise à développer les réflexions sur la mort. Cela explique en grande partie la raison pour laquelle ces opérateurs sont très influencés par les travaux des chercheurs. La « thèse du déni social de la mort » en particulier a eu un très fort retentissement sur leurs pratiques.
Les professionnels du funéraire se sont approprié les analyses formulées dans le cadre de cette thèse et ont cherché à y répondre en vue de contribuer à resocialiser la mort et de lui redonner un sens. Mais à n’en pas douter, les opérateurs funéraires se sont saisis de cette « thèse du déni social de la mort » comme de l’opportunité pour eux de se positionner davantage encore comme une figure incontournable de la ritualité funéraire. Ainsi organisent-ils régulièrement des conférences, des projections de films pour recréer des espaces de parole sur et autour de la mort, en s’appuyant sur le tissu socioculturel et associatif local, etc. Ils se présentent ainsi comme une référence, les détenteurs d’une connaissance en la matière, et sont par exemple sollicités dans les formations des futurs professionnels du soin.
On ne peut omettre dans l’analyse que les opérateurs funéraires ont également tiré profit de la CIFRE (lors de laquelle ont été recueillies les données de cet article), notamment dans leur recherche de légitimité. Une thèse conduite sur la ritualité funéraire, notamment civile, est en effet l’occasion pour ces professionnels, non seulement d’avoir un retour sur leurs pratiques, mais aussi de faire reconnaître leur rôle en la matière. D’autant plus que leur image est socialement dévalorisée : la figure du « croque-mort » a la peau dure. La prise en charge qu’ils assument désormais des soins aux défunts et de l’accompagnement des proches et familles, dans les dimensions symboliques et rituelles des obsèques, est un moyen pour eux de se construire une image plus valorisée (Lemonnier et Trompette, 2010). Il est d’ailleurs frappant de constater à quel point l’évocation de la personnalisation des obsèques civiles et de l’attention portée à l’organisation des rituels est source de fierté pour les professionnels, qui trouvent là une reconnaissance profonde de la part des familles et des proches qu’ils ont rencontrés et avec lesquels ils ont travaillé.
Enfin, la réflexivité des professionnels du funéraire s’exerce également dans les différents médias qui relèvent de ce secteur d’activité, que ce soit dans la presse ou sur internet. Ces espaces d’échange permettent de débattre des pratiques quotidiennes (port du cercueil à l’épaule ou utilisation d’un chariot, port du cadavre pour la mise en bière ou utilisation d’une table inclinable, lecture ou non de textes religieux au cimetière, etc.). C’est une manière d’y réfléchir collectivement, mais aussi de partager ses doutes et son vécu. Ces supports donnent également une visibilité à des questionnements et revendications propres à l’ensemble de ce secteur d’activité, qui ont trait à la fermeture ou à l’ouverture du marché par la législation – tels les débats sur les cercueils en carton et sur le devenir des cendres – ou encore par l’institutionnalisation des métiers par l’instauration de diplômes.
Les outils numériques (blog, réseaux sociaux, etc.) sont mobilisés par les professionnels en leur nom propre ou de manière anonyme. Ils leur permettent tantôt de mettre à distance leur activité et la mort par le recours à l’humour, tantôt de partager leur vécu avec leurs confrères et de défendre leur opinion sur telle ou telle question – il existe peu d’espaces de parole libre en dehors de leur milieu professionnel –, ou encore comme nous l’avons vu de perfectionner et d’enrichir leur manière de faire. Ceux qui se situent en haut de l’échelle hiérarchique, tels François Michaud Nérard ou Jean Ruellan cités dans cet article, mobilisent davantage les outils médiatiques de masse (télévision, radio, presse) pour exprimer leur point de vue au nom de la structure à laquelle ils appartiennent. En lien étroit avec le monde académique, ils interviennent aussi dans des colloques, publient des articles, dans des revues telles que Études sur la mort éditée par la Société de thanatologie, ainsi que des ouvrages. Les interventions de ces communicants s’inscrivent donc dans le cadre d’une pensée qui se veut, si ce n’est scientifique, du moins intellectualisée sur les pratiques, et ne sont pas sans rapport avec les intérêts de leur structure.
Au-delà de la réflexivité des professionnels sur les rituels funéraires, il est essentiel aujourd’hui de tenir compte de celle de leurs bénéficiaires, dans la mesure où ces derniers sont dorénavant partie prenante dans l’instauration de ces rituels.

La personnalisation et la réflexivité des bénéficiaires

Tout au long de leur développement, les rituels d’obsèques civiles sont caractérisés par l’indétermination de leur contenu et la difficulté à leur en donner un. C’est la personnalisation des obsèques, tendance manifeste, semble-t-il, dès l’introduction des cérémonies civiles [21], qui apparait comme une réponse pour les en doter, tout en respectant les valeurs d’authenticité auxquelles adhèrent leurs bénéficiaires. Toutefois, celle-ci implique que l’officiant connaisse suffisamment bien le défunt. Or, les proches de ce dernier n’ont pas toujours la capacité de prendre en charge l’organisation et l’office de la cérémonie, que ce soit en raison de leur état émotionnel ou encore du capital socioculturel dont ils disposent. Instaurer une cérémonie demande des ressources que tout le monde n’a pas en de telles circonstances.
Mais les proches ne sont pas totalement dépourvus de ressources. Aujourd’hui, les cérémonies civiles se développant, ils peuvent s’appuyer sur ce qui a été fait par d’autres. En matière funéraire, les pratiques se diffusent de manière horizontale, par le biais des interactions entre les personnes, non pas à l’identique, mais par appropriation. À ce titre, les processus de diffusion sont tout à fait comparables à ceux que Laurence Hérault a identifiés à propos des rituels de mariage (1997). C’est en assistant à des obsèques ou en parlant que se constitue donc un réservoir de pratiques appropriables, pouvant permettre aux personnes de se prononcer sur leurs volontés. Il est frappant de constater dans les discussions qui suivent un enterrement que les participants font état de ce qu’ils y ont particulièrement apprécié ou au contraire de ce qui les a choqués ou déçus. De la même manière, il n’est pas rare qu’en agence les personnes venant organiser des obsèques se réfèrent à celles auxquelles elles ont assisté et les érigent en modèles. Une grande part des familles, confrontées pour la première fois à la mort d’un proche et sans exemple à suivre, ignore tout néanmoins de l’organisation des obsèques.
De leur côté, les professionnels du funéraire ne connaissent pas, la plupart du temps, le défunt ni ses proches. Par conséquent, il leur est difficile d’instituer seuls un rituel personnalisé. Bien entendu, s’ils n’ont pas la possibilité de préparer en détail la cérémonie avec les proches, ils pourront malgré tout en proposer une à partir de ce qu’ils ont l’habitude de faire et qu’ils leur soumettront avant la cérémonie. À ce titre, certains professionnels du funéraire réaffirment le rôle qu’ils ont à jouer et leur responsabilité sociale. Néanmoins, s’ils peuvent suggérer des textes ou des musiques qui sont généralement appréciés par les familles et les proches, ils ne sont pas en mesure d’évoquer le défunt à partir de ce qu’il était de son vivant.
Dès lors, la qualité de la cérémonie civile résulte des échanges qui ont lieu avant celle-ci, afin que les professionnels, les membres des familles et les proches des défunts la conçoivent ensemble [22]. La personnalisation des obsèques et, par conséquent, cette rencontre sont d’autant plus déterminantes qu’elles constituent un argument concurrentiel :

Vendre un cercueil, c’est pas compliqué ; vendre un corbillard, c’est pas compliqué. Je veux dire, tout ça, c’est simple. Et puis après, il y a la réglementation, mais tout ça, c’est purement technique, c’est de l’orga, tout le monde est capable de le faire. Tous les confrères, tous les concurrents, tout le monde sait le faire. Par contre si l’entreprise veut se démarquer par la qualité de ses services, c’est justement en amenant ce qui va être reconnu en plus par la famille comme essentiel, bah c’est la personnalisation. […] C’est ce que j’appelle la chaleur ajoutée, c’est ce qu’on apporte en plus dans l’entretien.
(Cadre du secteur funéraire).

Il s’agit donc pour les professionnels de faire en sorte que les proches se saisissent de l’organisation de la cérémonie, en leur faisant des propositions et en recueillant leurs volontés. Leur rôle dans l’échange est de fournir un cadre appropriable et en principe malléable à souhait, même si au besoin ils rappellent à leurs clients d’éviter tout élément choquant ou irrespectueux. Au-delà de l’aspect éthique, à travers le déroulement des cérémonies, c’est également leur image de marque qui est en jeu. Les cérémonies constituent une véritable vitrine de l’opérateur funéraire. Aussi, outre le respect accordé au défunt et à ses proches, c’est à ce titre que les professionnels veillent grandement aux détails :

Tu vois, c’est tous des petits détails comme ça. Parce que dans l’assemblée, c’est tous des gens qu’un jour ou l’autre peut-être on les aura. […] plus tard, c’est un autre client pour nous. […] ils ont que ça à faire, donc ils nous regardent. Sans que nous on y pense, mais ils nous regardent.
(Porteur).


L’organisation de la cérémonie peut donc s’apparenter à une véritable négociation s’ils considèrent que les volontés des proches du défunt contreviennent à l’image de l’entreprise, mais aussi aux attentes des autres personnes présentes, dont ils vont régulièrement rappeler l’existence :

Il y avait presque 200 personnes dans la salle. Et le fils me dit : « j’veux rien ! Je veux rien, Madame ! » […] Il n’y avait pas à y revenir. Vis-à-vis des personnes du public qui était derrière, je ne souhaitais pas que les gens pensent qu’au crématorium ça se passait comme ça. « Me permettez-vous de dire deux mots pour que quand même les personnes sachent ce qu’elles sont en droit de faire ou d’attendre ? Parce que je lui dis, vous, vous savez ce que vous voulez. Mais, les personnes qui vont venir ne savent pas. »
(Officiant de cérémonies civiles).


Il peut en effet y avoir une certaine tendance à l’accaparement du défunt et des rituels par certains de ses proches, qui oublient que ceux-ci sont également là pour les autres membres de la famille et connaissances de la personne décédée. Or, la « personnalisation » consiste justement à considérer la personne comme produite par et productrice d’un ensemble de relations lui conférant une existence sociale (Le Bot, 2002 ; Gauchet et Quentel, 2009). C’est de l’ensemble de ces appartenances et filiations qu’il s’agit de rendre compte, en les mettant en scène, dans les cérémonies civiles (Dartiguenave et Dziedziczak, 2012 *). Parfois, néanmoins, cet accaparement du défunt et des rituels obéit au désir de retirer toute possibilité de recueillement aux autres :

Ce sont les obsèques d’un homme. Celui-ci s’est séparé de sa femme, mais n’a pas divorcé. Il a refait sa vie depuis plusieurs années avec une autre femme ayant deux enfants d’un précédent mariage. C’est l’ex-compagne, toujours épouse, qui est mandataire pour l’organisation des obsèques. L’organisation se fait à distance, par téléphone. Elle signale expressément à la conseillère funéraire qu’elle refuse que l’actuelle compagne et ses enfants puissent lui rendre visite à la chambre funéraire [espace privatisé accessible avec un code ou l’autorisation du mandataire]. Choqués, les jeunes indiquent qu’ils considèrent l’homme comme leur père. Pour eux comme pour leur mère, ce refus est d’une violence inacceptable. Après consultation de ses collègues, la conseillère en charge du dossier échange avec sa cliente pour qu’elle revienne sur sa décision. Ce qu’elle acceptera finalement de faire.
(Extrait de notes de terrain).


Il s’agit lors des obsèques de clore une histoire, aussi n’est-il pas rare que des conflits éclatent dans ce moment charnière. Les tensions déjà présentes initialement dans la famille vont se cristalliser autour de l’organisation des obsèques. Dans un tel contexte, les employés des pompes funèbres jouent le rôle de tiers. Ils essaient d’apaiser les tensions, de faire en sorte que tout le monde puisse y trouver son compte, sans devoir passer par le juge, seul recours possible si le conflit n’a pu être résolu par la discussion.
Les jeux de négociation autour de l’implication de chacun des proches dans l’organisation et le déroulement des rituels sont d’autant plus importants que, en tant qu’actes d’institution, les rituels funéraires viennent redéfinir l’identité du défunt et les relations que les proches entretenaient avec lui. Or ces relations étant constitutives de l’identité même de chaque proche, celle-ci se trouve redéfinie lors des obsèques. Ainsi, en cherchant à réaliser une cérémonie répondant aux volontés du défunt, qui soit à son image en ce qu’elle en rendrait compte à travers les différents aspects de son identité, les proches nous disent davantage leur propre relation au défunt, la vision qu’ils en ont n’existant qu’à partir d’eux-mêmes. En fin de compte, ils re-délimitent leur propre identité à travers celle du défunt. Toutefois, la référence au défunt, à ce qu’il était et à ce qu’il aurait souhaité, finit souvent par faire foi en définitive. C’est alors ce respect des volontés du défunt qui apparaît comme garant du bon déroulement des rituels funéraires civils :

Alors, on parle de la pré-organisation. On parle du côté efficacité. Enfin, entre guillemets, efficacité. C’est-à-dire qu’il faut qu’une cérémonie se déroule bien et plus elle est simple, plus elle correspond à l’état d’esprit de mon père, plus elle va être préparée et organisée. Je voulais, en tant que fils qui a tout organisé avec la confiance de ma sœur, je voulais que les funérailles soient à l’image de mon père, donc bien organisées, et mieux c’est organisé, plus cela coule de source, et quelques petits points, je dirais toujours, de détails se fondent dans ce rouleau compresseur à l’organisation.
(Louis, fils du défunt).


Mais l’organisation des obsèques n’est pas toujours conflictuelle. Bien au contraire elle passe plus fréquemment par un jeu subtil autour de la part de chacun dans l’organisation et le déroulement de la cérémonie, en choisissant une musique ou en lisant un texte, et par l’emplacement dans la salle où se tient la cérémonie – sachant que les codes sociaux veulent que les plus proches soient situés à proximité directe du cercueil :

Nous nous étions installés dans la salle au deuxième rang, pour ne pas nous mettre en avant. Un de nos amis, il était derrière nous, il nous a dit de nous mettre au premier rang, pour pas que ce soit des personnes qui connaissaient moins bien M. qui s’y mettent, « vous êtes plus proche de lui ». Je pense qu’il nous a dit ça pour pas que ce soit un de ses amis parisiens.
(Melody, amie du défunt).


Les négociations se prolongent donc dans le déroulement même de la cérémonie. Par crainte de réactions inconvenantes, certains décident de se prémunir contre tout discours imprévu, comme ces deux sœurs demandant instamment au maître de cérémonie de ne pas dire à l’assemblée : « si quelqu’un veut prendre la parole ». Elles ne voulaient pas courir le risque d’entendre des remarques sur les circonstances du décès de leur mère, morte avec son époux dans un accident de voiture imputé au taux d’alcoolémie du couple. Mais il arrive que certaines personnes s’autorisent à dire quelques mots :

Au crématorium, pour les obsèques d’un homme. Pendant le dernier geste d’au revoir, une femme en passant devant le cercueil prend la parole à haute voix, elle s’adresse à son ex-époux : « même si tu m’as trompée, je t’ai toujours aimé ». L’actuelle compagne du défunt est présente et à proximité du cercueil en raison de son statut.
(Extrait de notes de terrain).


D’autres encore essaient de prendre appui sur les professionnels du funéraire pour qu’on lise leur texte, sans en avoir demandé l’accord préalable aux autres membres de la famille. Dans de telles circonstances, l’officiant aura tendance à refuser ou à consulter rapidement ceux qui se sont chargés de l’organisation de la cérémonie.
Il est en effet important de rappeler que tous les proches du défunt (famille, amis, etc.) ne participent pas à l’organisation des obsèques avec les professionnels du funéraire. Généralement, seuls quelques-uns d’entre eux se font les intermédiaires avec l’officiant. C’est lors des temps de socialité familiale et amicale, avant la cérémonie, qu’ils se répartissent généralement les tâches, selon leurs compétences ou leur proximité avec le défunt :

C’est mon père qui a choisi les musiques. Il est musicien, c’était très important pour lui. Et il m’a demandé si je pouvais lire un texte, j’ai accepté. J’ai fait du théâtre, j’étais donc la mieux placée pour le faire. Je n’ai pas eu peur, j’ai dit le texte pour ma grand-mère.
(Charlotte, petite fille de la défunte)

À partir de 93 ans d’âge, il s’est un petit peu laissé… disons conduire et c’est moi qui étais chargé par rapport à ma sœur de faire tous les dossiers. C’était « t’es l’homme des dossiers ». Et mon épouse, la personne qui s’occupait du côté matériel, s’il y avait des choses à faire pour des vêtements, machin… Voilà […] Comment organiser ? C’était très simple, pour moi, parce que ma sœur me fait confiance – depuis déjà pas mal d’années parce que c’est moi qui m’occupais… parce qu’elle habitait Montpelier alors… euh bon… tout ce qui était argent, paperasse, petites correspondances… en fait j’étais, entre guillemets, le secrétaire, le fils-secrétaire.
(Louis, fils du défunt).


Quant aux intervenants extérieurs à la famille, qui appartiennent aux autres réseaux d’appartenance du défunt, ce sont généralement eux qui prennent contact avec les pompes funèbres ou directement avec la famille en amont des obsèques ou le jour même, comme ici :

J’ai été agréablement, pas surpris, mais il y eut un ancien de l’administration qui est venu au nom des collègues, qui nous a demandé s’il pouvait faire un témoignage, un hommage à mon père. […] Tout ça fait qu’il y a eu aussi, non seulement le côté famille, le côté voisin et… […] Alors, je l’avais remercié.
(Louis, fils du défunt).


Au-delà de la cérémonie elle-même, c’est dans cette répartition des rôles à tenir et des tâches qu’exige un décès que se négocient les places autour du défunt et que se redéfinissent les statuts des uns et des autres au sein de la famille et des groupes de pairs.

Conclusion : la réflexivité au fondement des rituels funéraires civils

En confrontant l’être humain à la pure altérité, à sa finitude, la ritualité funéraire est réflexive par excellence. Elle conduit les participants à s’interroger sur eux-mêmes, le sens de la vie et de leur propre vie, la valeur qu’ils accordent aux choses et aux personnes, aux relations qu’ils nouent avec ceux qui les entourent, etc. Il est frappant de constater à travers l’étude des données recueillies, dont nous avons en partie rendu compte dans le présent article, que ce sont également les processus réflexifs des différents participants qui sont au cœur des dynamiques rituelles.
La réflexivité, qui n’est pas réductible à l’analyse logique d’une situation, est cette capacité humaine de distanciation (Le Bot, 2002 ; Dartiguenave, 2001 ; Quentel, 2001), qui permet à tout un chacun de prendre du recul sur cette situation, de s’en extraire en étant à la fois ici et ailleurs, et ainsi de réinterroger ce qui se joue, sa place, sa pratique, etc. Or, nous l’avons vu, ce sont bien les négociations qui s’opèrent entre les proches et les opérateurs funéraires, mais également entre les bénéficiaires des rituels eux-mêmes qui permettent de constituer aujourd’hui le contenu des cérémonies civiles. D’elles dépend l’appropriation des rituels sans laquelle l’efficacité de ces derniers peut se trouver remise en cause. Tout se passe alors comme si c’était dans les à-côtés de la cérémonie, qui se donne officiellement comme le cœur des obsèques, que le rituel se réalisait pleinement. C’est en effet dans l’élaboration des rituels que se réalise ce qu’ils mettent en jeu, à savoir la reconfiguration des relations et des identités des membres des groupes sociaux en question (Hérault, 1997 ; Segalen, 1997).
C’est donc à travers cette multitude d’histoires singulières que les rituels s’instaurent, avant que d’autres ne se les approprient, et c’est cela, semble-t-il, qui non seulement en constitue la dynamique, fait qu’ils se transforment, mais leur confère également leur efficacité. Ainsi les rituels apparaissent comme étant le fruit d’un rapport dialectique entre une capacité de distanciation et d’analyse sociale, et le réinvestissement de celle-ci dans la situation en vue de se les approprier.

add_to_photos Notes

[1Elles représentaient 25 % des obsèques en France en 2009, selon le groupe d’entreprises funéraires OGF.

[2Graphique réalisé à partir des données transmises par l’Association nationale crématiste (http://association-nationale-crematiste.fr/) et la Fédération française de crémation (http://cremation-ffc.fr).

[3Celle-ci s’inscrit dans le cadre d’une collaboration CIFRE (Convention industrielle de formation par la recherche) avec le groupe OGF, auquel appartiennent notamment les Pompes Funèbres Générales, au sein desquelles nous avons été pendant trois ans chargée d’étude.

[4Nous prenons le parti dans nos travaux d’interroger les pratiques funéraires par le biais de la ritualité et des formes qu’elle peut prendre dans un contexte donné. Si dans le champ de la mort la question des rites n’est pas nouvelle, depuis la « thèse du déni social de la mort », largement liée au débat sur la ritualité et la tradition qui avait cours dans le même temps, les chercheurs ont eu tendance à considérer que le rite n’était pas un concept opératoire dans l’étude des pratiques funéraires émergentes (Clavandier, 2009), ce qui fait d’ailleurs dire à Jean-Hugues Déchaux : « Cette thèse [du déni] repose implicitement sur le postulat de la centralité du rite. Le déni survient lorsque le rite s’éclipse » (2004 : 18). Nous proposons justement de réinterroger le concept de rituel lui-même, à l’aune des travaux existants à ce jour sur la ritualité, dans une conception dynamique du rituel (Bouchard et Segalen, 1997) et « profane » (Rivière, 1995). Les jeux de négociation entres les différentes parties prenantes des rituels sont à ce titre très éclairants et permettent une autre lecture des rituels funéraires contemporains.

[5Afin de garantir l’anonymat des personnes qui ont participé à cette recherche, tous les noms ont été modifiés.

[6Si tous les opérateurs de pompes funèbres remplissent une mission de service public, industriel et commercial depuis la loi Sueur de 1993, leurs statuts sont divers (entreprise privée, régie municipale, artisan et association), tout comme leur poids sur le marché, leurs enjeux, etc. À ce titre, on ne saurait les loger tous à la même enseigne.

[7Certaines associations s’investissent également dans les obsèques civiles, telles que l’association l’Autre Rive à Lyon (association de bénévoles chrétiens créée par Christian Biot), le collectif Dignité cimetière à Rennes pour les personnes indigentes et/ou seules, ou encore le collectif Les Morts de la Rue à Paris.

[8Cette question de la légitimité des cérémonies civiles et de l’instauration de rituels est récurrente chez les professionnels du funéraire.

[9Les deux mouvements ne se confondent pas, mais défendent des idées communes, dont celle des obsèques civiles.

[10Citant Lepelletier, La Marseillaise, 1er janvier 1879.

[11Le terme désigne les membres du mouvement du même nom, et non les personnes qui ont recours à la crémation. Précisons ici que les personnes qui recourent à ce mode de traitement du cadavre ne sont pas toutes anticléricales, bien au contraire. En France en 2009, 53 % des crémations avaient lieu dans le cadre d’obsèques religieuses, toutes confessions confondues (OGF, février 2010).

[12Synthèse réalisée à partir de Dans l’espérance chrétienne. Célébrations pour les défunts. Paris : Desclée-Mame, 2008. p. 78-79, 95 et 121.

[13D’une région à l’autre ce geste est introduit à des moments différents. Par exemple, dans certaines paroisses de Lille, la bénédiction par l’assemblée s’effectue avant la cérémonie, en raison de l’habitude prise dans le passé de venir bénir le cercueil, entreposé dans l’une des chapelles de l’église la veille des obsèques, pour des raisons pratiques pour les pompes funèbres. Si le cercueil n’est plus exposé à l’avance dans l’église, la pratique de la bénédiction, elle, est restée.

[14Il existe toutefois des opérateurs de pompes funèbres confessionnels, tels que les Pompes Funèbres de l’Ille à Rennes, de confession catholique, ou encore les Pompes Funèbres El Ouadjib à Lille, de confession musulmane.

[15Jean Ruellan est directeur du marketing et de la communication au sein d’OGF.

[16L’intégration ou non d’éléments religieux dans les cérémonies civiles fait débat au sein des professionnels du funéraire.

[17« Les cérémonies mises au point au crématorium du Père-Lachaise, mais qui peuvent être déclinées en tout autre endroit, comportent des étapes incontournables et dont l’ordre est immuable. […] C’est le rituel qui donne du sens : faire ce que des milliers de personnes ont fait avant soi et qui s’en sont sorties, c’est commencer à prendre en considération le fait que l’on peut soi-même s’en sortir. » (Michaud Nérard, 2014).

[18Marque de modestie en matière funéraire, héritée semble-t-il entre autres des valeurs d’égalité et de simplicité prônées par les libres-penseurs, qui se sont construites en opposition au faste de certaines des classes funéraires catholiques. (Il existait notamment une classe d’enterrement pour les pauvres, sans « faste »).

[19Les opérateurs funéraires en Espagne, notamment le groupe Mémora, sont maîtres dans l’art de proposer des produits annexes aux obsèques, d’autant plus que la législation en matière de vente d’articles funéraires et les régulations du marché sont très différentes de la situation française. Ainsi la palette est très vaste : tenue vestimentaire pour les défunts, nécessaire de toilette dans les chambres funéraires, marque page de cérémonie rappelant le nom et les dates de naissance et de décès du défunt, souvent doté d’une image et d’une citation, diamant réalisé avec les cendres du défunt, service de fleurs du souvenir avec carte de condoléances, service musical pour la cérémonie, extraction de tissu du cadavre pour la conservation de l’ADN, etc.

[20Tous les organismes de pompes funèbres ne sont bien entendu pas logés à la même enseigne, certains ont davantage de capitaux non seulement financiers, mais aussi culturels et sociaux, que d’autres. Ainsi nous pourrions distinguer des opérateurs et des professionnels avec un profil de « commerçant » (détenteur d’un petit commerce local) et d’autres avec un profil de « commercial » (maîtrisant les outils de marketing et de communication).

[21Il est à noter toutefois que la personnalisation des rituels n’est pas propre aux obsèques civiles, on la retrouve également aujourd’hui dans les funérailles catholiques.

[22Dans le cadre des obsèques catholiques, aujourd’hui, la rencontre entre le prêtre et/ou les laïcs et les proches du défunt pour préparer la cérémonie religieuse est elle aussi déterminante dans l’appropriation que ces derniers pourront faire du rituel.

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Pour citer cet article :

Pauline Dziedziczak, 2016. « Les rituels funéraires civils en France : entre rupture, tradition et négociations ». ethnographiques.org, Numéro 33 - décembre 2016
Retours aux rituels [en ligne].
(https://www.ethnographiques.org/2016/Dziedziczak - consulté le 25.04.2024)
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