« Et moi des fois je me dis, ça vaudrait le coup de revivre ça, cette tranquillité de vie où y a le fourneau, où ils vont se coucher direct. Et on en revoit des maisons du pays qui sont réinstallées dans ce sens là. Moi je trouve que ce serait extraordinaire […] Moi j’ai vu une personne, le monsieur il faisait un peu de menuiserie mais la dame, ils avaient une vache et pis quand la vache elle portait son veau et pis qu’ils avaient pas beaucoup de prés, ils la mettaient en pension le temps qu’elle avait pas le lait avant de faire le veau et à la place ils avaient une chèvre. Elle faisait le lait pendant que la vache n’était pas là. Tout était bien calculé ! Ils étaient sages les gens d’autrefois, ils vivaient sur eux même […] Je vais vous montrer un modèle de soulier, c’est exactement nous ce qu’on mettait pour aller à l’école, avec le bois, semelle en bois cloutée pour pas que ça s’use, garnie devant pour pas que ça s’use parce que le cuir valait très cher, c’était du vrai cuir, il est un peu raide […] Y avait pas de travail l’hiver quand y a la neige, quand y a trop de neige, parce que vous vous rendez compte, autrefois ils faisaient leur petit fromage bien au coin du feu, ils sortaient pas tellement, une fois par semaine pour aller faire les courses. Ils rentraient, à l’automne ils rentraient la marchandise pour les vaches, il fallait acheter de l’orge, le tonneau de vin, y avait le saloir où y avait le cochon et ils sortaient pas tellement, ils allaient à la messe […] Là-bas y avait un petit père, quand j’étais jeune, qui faisait la ferme. Mais vous vous rendez compte, il prenait la bouille [un récipient à lait] le matin, il faisait 3 km dans la neige pis quand on enfonce de 50 cm dans la neige pis que ça souffle devant, vous avez de la neige plein la figure […] parce qu’autrefois nous on sortait des fermes à ski, on avait jamais de chemin d’ouvert, personne voyageait en voiture, d’ailleurs on avait pas de voiture dans les maisons, on partait à l’école à ski, on revenait à ski, on avait le papa qui faisait le chemin avec les raquettes, les vieilles raquettes d’autrefois, vous savez, c’est la raquette que les gens fabriquaient à la ferme. Il faisait son chemin et il restait l’année le chemin et il mettait des piquets, ce qu’on appelait les bronchons, c’était un nom patois, c’était une branche tous les dix mètres pour savoir où il avait passé, ce qui nous servait bien en cas de brouillard ou quand la neige revenait. Il refaisait une passée alors toujours sur le même chemin et on pouvait même aller à l’école à pied, c’était pas évident mais on a un bon souvenir de cette époque, on avait pas beaucoup de sous mais on a un bon souvenir. Nous, on était huit chez nous, on était déjà bien cinq en même temps à l’école. Les voisins, ils étaient quatre alors on partait tous en bande […], c’est des bons souvenirs qui nous sont restés, c’était une bonne ambiance, oui, quoi que les jeunes de maintenant ils sont heureux hein, tant qu’ils savent vivre et qu’ils savent bien prendre la vie, ils ont de l’argent pour se suffire largement, ils peuvent prendre des vacances en famille, ce qu’on pouvait pas autrefois. Bon, c’est une autre façon de vivre … » (Marceline).